Quand Macron ricane des naufragés de la Françafrique
Bruno Guigue
Les kwassas kwassas, le drame humanitaire derrière la « blague » de Macron
Ces frêles embarcations très connues à Mayotte ont fait des milliers de victimes parmi les Comoriens candidats à l’émigration.
IMMIGRATION – A l’origine, il s’agissait du nom d’une danse congolaise saccadée très populaire dans les années 80. C’est pour illustrer le mouvement de la mer qui les fait tanguer et menace de les faire chavirer que les canots de pêche en provenance de l’archipel des Comores ont été rebaptisés « kwassas kwassas ».
En plaisantant cruellement sur le sort de ces navires qui « pêchent peu » mais « amènent du Comorien », Emmanuel Macron aura au moins eu le mérite de rappeler l’existence de ce drame humanitaire méconnu en métropole qui fait des milliers victimes dans l’Océan indien.
Dernier territoire d’outre-mer à avoir accédé au statut de département après un référendum en 2009, Mayotte est la cible d’une intense et constante immigration illégale, essentiellement en provenance de l’archipel voisin des Comores. Mayotte se situant à moins de 70 kilomètres de l’île d’Anjouan, il est possible de réaliser la traversée en bateau en empruntant un bras de mer connu depuis comme « le cimetière des kwassas kwassas ».
Beaucoup de candidats à l’émigration embarquent en effet à bord de ces bateaux de pêche pleins à craquer dans des conditions sanitaires et sécuritaires déplorables. En 2012, un rapport d’information du Sénat décrivait en ces termes la dangereuse traversée:
Mesurant 10 mètres de long sur un mètre de large, ces embarcations accueillent jusqu’à 50 personnes, qui naviguent au niveau de la mer, alors qu’elles ne devraient transporter que huit ou neuf personnes si les normes de sécurité étaient respectées. Le voyage dure en moyenne vingt-cinq heures.
Un kwassa kwassa rapporte entre 300 et 500 euros par passager
Ce même rapport évaluait le nombre de victimes ayant péri en mer pour rejoindre Mayotte entre 7000 et 10.000 morts depuis 1995. Un bilan probablement sous-estimé et qui n’a cessé de s’aggraver depuis, le niveau de vie moyen à Mayotte, bien que très inférieur à celui de la métropole, étant huit fois supérieur à celui des Comores.
Comme pour le drame des migrants qui tentent la traversée de la Méditerranée, les kwassas kwassas font la fortune des passeurs. Un canot rapporte 300 euros, parfois 500, par passager: « il est donc rentabilisé même s’il est intercepté. Ces barques sont souvent pilotées par des mineurs en raison de l’impunité pénale dont ils bénéficient, ce qui permet de préserver les responsables de filières de poursuites pénales », prévient le rapport sénatorial.
Un des coauteurs de ce rapport, le sénateur socialiste Jean-Pierre Sueur, a raconté avec émotion sur son blog la tragédie des « enfants perdus des kwassas kwassas ». « La barque est si chargée qu’elle navigue à même le niveau de la mer. Il y a des naufrages, des noyades, des disparitions, des êtres humains qui passent par-dessus bord », décrit-il en constatant l’impuissance de la police des frontières qui interpelle presque chaque jour l’une de ces embarcations ».
La seule réponse possible: le codéveloppement
« Ceux qui sont interpellés en mer ou à l’arrivée dans un état de grande fatigue et d’épuisement ou ceux qu’on interpelle sur l’île se retrouvent au centre de rétention administrative. […] Mais l’efficacité de la reconduite est limitée. Car la moitié des personnes reconduites (chiffre officiel : c’est très certainement davantage!) reviennent quelques jours ou semaines plus tard dans la lugubre noria des kwassas kwassas », prévenait alors le sénateur.
Face à l’inefficacité de la stratégie de reconduite aux Comores des migrants, les autorités françaises espèrent nouer un partenariat avec les Comores censé contribuer à endiguer le nombre de candidats à l’exil. « Je suis venu vous tenir le langage de responsabilité de la République », avait plaidé Emmanuel Macron pendant sa campagne présidentielle, proposant « une stratégie de développement des Comores ». « C’est le seul moyen d’endiguer cette immigration ».
« Qui peut vous promettre qu’il n’y aura pas demain des kwassas kwassas, personne « , avait-il alors développé à l’occasion d’un passage à Mayotte. Sans mauvais jeu de mot cette fois-ci.
M. le président s’exprime peu mais quand il le fait….ce n’est pas vraiment du niveau de François Mitterrand (loin s’en faut!).Seul Jean-Marie aurait osé.Bravo, quelle élégance, ce costume, M. l’aristo. du système ! Bravo, quelle élégance, quelle humanité, quel humour, quelle culture, quelle poésie aussi !