Kagame a raison. Sankara et Gbagbo, “ont fait preuve de naïveté”
Kagame a raison. Sankara et Gbagbo, “ont fait preuve de naïveté”
Dans le tourbillon d’actualités qui secoue la Côte d’Ivoire, certaines sont mises au frais ou comme disent les Américains “on the back burner” pour être exploitées et traitées au moment propice. Ces types de nouvelles ressortent souvent après une houle afin de mieux être consommées. Un peu comme savourer les fruits hors-saison préalablement conservés de façon traditionnelle dans des bocaux.
C’est le cas d’une information mettant en cause le président Paul Kagame qui aurait dit, “Laurent Gbagbo et Thomas Sankara sont deux grands leaders qui ont fait preuve de naïveté.”
Cette opinion de Kagame semble excessive pour certains. Mais elle reste une tempête dans un verre d’eau. Le seul article qui s’en prend à Kagame, est presque le même qui trône dans l’ensemble des media papier et électronique. Ce point de vue semble donc, soit fondé, soit de moindre intérêt.
Trois cercles pour comprendre Kagame
Trois cercles de fréquentation sont essentiels pour comprendre le leader Rwandais. Un, le cercle Rwandais. Discuter avec ses proches, ou mieux l’écouter, permet de mesurer l’amour et le respect qu’il voue à ces personnalités politiques—D’ailleurs, Kagame est au nombre des rares chefs d’Etat Africains qui ont pris fait et cause pour le président Gbagbo. Mieux, il reste prêt à l’accueillir sur son sol.
Deuxième et troisième cercles. Ceux des camarades du Capitaine-président Sankara et du président Gbagbo. En faisant une plongée dans ces deux milieux, on entend certains de leurs compagnons de route, reconnaître qu’ils ont “fait preuve de naïveté” parfois au moment crucial. Le dire, ce n’est pas proclamé son “désamour” ou exprimé son “animosité” à leur endroit. C’est juste une honnête autocritique. Une autoflagellation corrective pour ceux qui pensent que, être taxé de “faire preuve de naïveté” est un mauvaise étiquette.
En considérant l’approche négative que pourrait contenir cette mot, le “rusé” Kagame les aurait averti—Ce “jeu” du chat et de la souris est dangereux. Mais ils avaient préféré faire la “Révolution” et conquérir leur “souveraineté” en gardant les mains propres. Les détails ne sont pas importants.
Vertus appelées “naïveté”
De quelle “naïveté” parlait le président Rwandais? D’une part, la “naïveté” est comprise comme une “simplicité et franchise naturelle dans l’expression.” Une autre approche dit que la “naïveté” est une “simplicité, grâce naturelle empreinte de confiance et de sincérité.” Enfin, elle est vue comme un “excès de confiance, de crédulité, résultant souvent de l’ignorance, de l’inexpérience ou de l’irréflexion; marque de cet état d’esprit.”
Tout le monde, y compris le président Kagame, sait que Sankara et Gbagbo, de par leur formation politique, leurs connaissances, et leur “copinage” avec les armes, n’ont pas été des acteurs politiques “crédules,” “ignorants,” “inexpérimentés,” “irréfléchis,” pour verser dans un “excès de confiance.” En plus, on ne peut pas taxer Sankara, et encore moins Gbagbo, qui a passé le clair de sa vie à faire de la politique un métier, à faire la critique des systèmes politiques, et à séjourner en prison pour ses idées, de “crédule.”
Alors, la naïveté pensée par Kagame pourrait simplement être cette “simplicité et franchise naturelle dans l’expression” qui caractérisait ces deux grands hommes. Ou encore, cette “simplicité, [remplie de] grâce naturelle empreinte de confiance et de sincérité” qui était un facteur clef de leur nature. Pourquoi donc s’affoler, déterrer les morts, secouer les chaînes des prisonniers pour essayer de démolir Kagame?
Ce sont ces vertus que l’on compare à la “naïveté,” qui ont concentré les panafricains autour de ces grandes figures Africaines. Ces qualités les ont fait entrer dans l’histoire des héros Africains et des grands hommes que l’histoire de l’humanité retiendra.
La raison tuée par l’émotion
Sankara assassiné. Gbagbo déporté. Ces deux faits ont créé un choc émotionnel qui tue parfois la raison en certains. Les procès d’intention, les jugements hasardeux, prennent rapidement la place d’une argumentation saine et constructive. L’affaire(?) “Sankara et Gbagbo ont fait preuve de naïveté” entre dans ce calibre de grosses colères non-argumentées.
Ainsi, quelques rares personnes, même pas une poignée, qui ont saisi cette “affaire(?)” au rebond se sont égarées sur le fond de la question en portant des accusations certaines(?) et graves, sûrement par affiliation amicale.
Les Burkinabè interpellés
Ces propos de Kagame parlent plus aux Burkinabè qu’aux Ivoiriens tendance “souverainiste.” En mettant sur une même estrade Woody et Sankara, il rappelle au Burkinabè qui “vénèrent” ce dernier, que ces deux hommes poursuivaient les mêmes objectifs. Donc, avaient les mêmes ennemis—La francafrique maçonnique, le Nouvel Age, et le “Commonwealth du Monde des Nations,” appelé aussi le Nouvel Ordre Mondial.
Si par instincts ethno-tribalistes, les Burkinabè ont soutenu aveuglement Alassane Ouattara contre le président Gbagbo, le leader Rwandais les interpelle à travers Gbagbo, sur la vision panafricaniste de Sankara. Et les invite à défendre les idéaux du Woody et les campagnes pour sa libération. Une mise en liberté qui serait aussi la victoire de Sankara sur son assassin Compaoré, ennemi du peuple Burkinabè d’en bas, et ami de Ouattara.
Kagame a eu raison
Il a simplement donné un avis sur l’esprit qui a gouverné le parcours politique de ces grands hommes d’Etat. Il n’a pas porté un jugement négatif sur leur personnalité morale, ni sur leur programme politique.
Ceux qui se sont précipités à donner une connotation négative aux propos de Kagame n’ont pas aussi retenu qu’il s’est incliné et honoré Sankara et Gbagbo en les qualifiant de “grands leaders.” Ce qu’il est loin de dire d’une multitude de dirigeants du monde.
Alors le président Kagame a eu raison. “Gbagbo et Sankara sont deux grands leaders qui ont fait preuve de naïveté” positive et d’excès d’optimisme.
Feumba Samen