Quand l’Emergence est un mot clé de la Com du FMI

VENDEURS D’ILLUSIONS

Pour comprendre le présent, il est toujours bon de revisiter le passé, surtout quand il s’agit des mêmes acteurs. Je vous propose d’abord une petite introduction du livre que je viens de lire, et dont je vous livrerai quelques bonnes feuilles, autant que faire se pourra.

Ce livre,  » De la déstabilisation à la refondation « , écrit par Marie-France JARRET et François-Régis MAHIEU, a été publié aux éditions L’Harmattan, en 2002. Il montre les errements des institutions de Bretton Woods, c’est-à-dire le FMI et la Banque Mondiale dont on retrouve dans les lignes un demi-aveu d’échec qu’il faut en réalité interpréter comme un vrai aveu d’échec.  » On a trop peu cherché à savoir si le bilan économique globalement décevant de l’Afrique représente un échec pour celle-ci ou pour l’ajustement « . a écrit la Banque Mondiale dans un rapport qui date de 1994. L’ajustement dont il est ici question, c’est en fait la Politique d’Ajustement Structurel, les fameux P.A.S dont la Côte d’Ivoire a été , comme d’autres pays, un terrain d’application sur une période assez longue, » deux décennies de plans de stabilisation et d’ajustement qui ont beaucoup déstabilisé l’économie et la société ivoirienne. »

 » Classée de 1970 à 1979 comme un pays à croissance rapide ( futur pays  » émergent « ) avec un taux de croissance annuel moyen du PIB de 6.7%, la Côte d’Ivoire était considérée en 1998 par le Fonds Monétaire International (FMI) et la Banque Mondiale comme le cinquième pays admis à bénéficier de l’initiative PPTE ( Pays Pauvres Très Endettés). ». peut-on lire dans ce livre. On est donc passé de la perspective d’un pays émergent à la réalité d’un Pays Pauvre Très Endetté.

Vous l’aurez remarqué, on parlait déjà au FMI d’où vient Ouattara, à propos de la Côte d’Ivoire, d’émergence avant d’admettre que c’est un échec, et de chercher à sauver ce qui pouvait encore l’être, souvent au détriment de la souveraineté du pays qui doit brader son patrimoine public, même stratégique.

Quand il faut rembourser les dettes et que l’argent manque, alors on liquide les bijoux de la famille, et les créanciers sont sans états d’âme !!!

Nous verrons donc ensemble qu’il ne suffit pas de venir du FMI ou de la Banque Mondiale pour avoir une bonne pratique de gouvernement car, poursuivent les auteurs de ce livre, qui date quand même de 2002, ces institutions voient d’abord et surtout nos pays , et notamment la Côte d’Ivoire comme une  » plantation de crédits  » sur un marché qui a ses propres règles. « .  » Ce marché, écrivent-ils, suit ses propres règles qui consistent à vendre aux pays en voie de développement des crédits qu’ils rembourseront par la suite. ». Point.

La situation difficile de notre pays la Côte d’Ivoire, a donc attiré des développeurs ( c’est-à-dire des gens qui se disent spécialistes en développement mais qui n’ont jamais développé aucun pays) et des montagnes de crédits. Et c’est toujours dedans que nous sommes.

Dans ce livre, il y a une partie qui concerne la gouvernance de Ouattara de 90 à fin 93, que je vous proposerai, et vous verrez alors que la pratique de gouvernement de l’homme d’hier ne diffère pas de celle de l’homme d’aujourd’hui.

L’homme qui parle aujourd’hui d’émergence, comme le FMI hier, et comme Christine Lagarde, actuelle présidente du FMI qui n’a pas hésité à prédire  » un deuxième miracle ivoirien. » lors d’un voyage à Abidjan, est le même que celui d’hier. Ouattara n’a ni changé , ni changé de méthode, et nous le verrons dans une autre publication.

L’émergence est un terme qui n’a pas été popularisé à l’époque du président Houphouët-Boigny, mais les ivoiriens se souviennent encore très bien du « miracle ivoirien » et des grands éloges des actions et des qualités de l’homme, célébrant ses  » mérites  » pour installer ses compatriotes dans la certitude que tout allait bien. Cette campagne de communication permanente avait atteint ses objectifs puisque ce  » miracle ivoirien  » les avait remplis d’une fausse fierté, avant de finalement se transformer en mirage, et même en cauchemar. Un cauchemar dont ils peinent aujourd’hui encore à sortir, et dont ils n’ont toujours pas fini de payer les conséquences en terme de dégradation de leurs conditions de vie..

Les ivoiriens ont donc connu le  » miracle ivoirien « , ils connaîtront aussi  » l’émergence  » que leur promet un transfuge du …FMI dont les méthodes n’ont guère varié, pour le malheur de la Côte d’Ivoire !

Alexis Gnagno