Ouattara accuse Houphouet-Boigny, Konan Bédié, Laurent Gbagbo dans la situation de crise que le pays traverse…

J’ai un beau nombril, les méchants ce sont les autres, et bla et bla et bla…

Le président Ouattara accuse Houphouet-Boigny, Konan Bédié, Laurent Gbagbo dans la situation de crise que le pays traverse...

Sorti en ce mois de juillet 2017, l’ouvrage intitulé  »L’Afrique en Marche, un manuel pour la réussite économique », co-rédigé par l’ex-président nigérian Olusegun Obasanjo, Pr Greg Mills, ex-conseiller du président Paul Kagame et directeur général de la fondation Brenthurst (basée à Johannesburg), Gl Dickie Davis, conseiller spécial à la fondation Brenthurst, et Jeffrey Herbst, Pdg du Newseum, renferme des révélations inédites du président ivoirien, Alassane Ouattara. Ces révélations concernent non seulement sa propre gestion du pouvoir d’État, mais aussi et surtout celles de ses prédécesseurs. Notamment feu Félix Houphouët-Boigny, Aimé Henri Konan-Bédié et Laurent Gbagbo. Ouattara entame ses confidences aux auteurs du livre par son arrivée dans l’arène politique ivoirienne en tant que Premier ministre sous le président Houphouët-Boigny. «Au cours de la crise des années 80, j’ai été appelé de la Banque centrale (Bceao, ndlr) pour aider à stabiliser la situation. Malgré mon désir de retourner à la Banque, en novembre 1990, j’ai été nommé Premier ministre», dira-t-il. Poursuivant, il explique que les résultats des mesures que son équipe et lui ont entreprises étaient  »assez bons ». Ce qui leur a valu de mettre  »un frein au déficit et améliorer la gouvernance ». Toutefois, la tâche ne semble pas lui avoir été facile à exécuter. Du moins, si l’on s’en tient à ce qu’on pourrait qualifier de griefs que le Premier ministre d’alors formule aujourd’hui (allusion à la date de l’échange avec les auteurs du livre) à l’égard de son  »père ». «Le président (Houphouët, ndlr) avait été au pouvoir pendant 30 ans. Par conséquent, les problèmes de gouvernance étaient énormes. Puis, le président est mort, et les problèmes économiques se sont transformés en une deuxième phase politique de problèmes», fait remarquer le président Ouattara. 

 

«BÉDIÉ A ESSAYÉ DE ME DÉCLARER INÉLIGIBLE»

Les remontrances de l’actuel chef de l’État ivoirien ne vont pas s’arrêter à Houphouët-Boigny. Ce d’autant plus que l’accession au pouvoir du successeur du père fondateur de la Côte d’Ivoire moderne a constitué une période sombre de sa vie, qu’il n’oubliera certainement pas de sitôt. «Le nouveau président [Henri Konan Bédi] a tenté de renverser toutes les réformes, y compris l’ouverture traditionnelle de notre société et de notre économie. Il a même, dit-il avec un sourire, essayé de me déclarer inéligible au mandat de président». Le président Ouattara ne fait pas table rase de l’épisode de feu le général Robert Guéï, l’ex-chef de la junte militaire qui a conduit le pays de 1999 à 2000. En ce qui concerne son prédécesseur Laurent Gbagbo, l’ouvrage aborde ce chapitre par l’intervention d’un diplomate, en poste dans le pays lors des présidentielles de 2010. Il soutient que «sa (Gbagbo) poursuite d’entreprendre une action destructrice et violente a été la cristallisation de l’effondrement économique et politique de la Côte d’Ivoire; tandis que l’intervention internationale pour assurer l’installation d’un dirigeant élu démocratiquement était un effort évident pour ramener le pays sur une voie de croissance économique et politique libérale. Eh bien, cette intervention a été fructueuse». Un point de vue que le père de la troisième République ivoirienne épouse pleinement, vu qu’il attribue à la gouvernance de Laurent Gbagbo la dégradation des conditions de vie des Ivoiriens, le déclin du système judiciaire, la division au sein de l’armée, les tueries de la crise post-électorale, etc. «Quand J’étais Premier ministre, l’espérance de vie était de près de 60 ans. Vers 2010, elle était tombée à seulement 50 [ans]. La situation était terrible», accuse Alassane Ouattara. Puis d’enfoncer le clou: «Il y avait une anarchie totale dans l’armée. Le système judiciaire n’était pas opérationnel. Plus de 3 000 personnes ont été tuées».

 »GBAGBO, LE TRIBALISTE XÉNOPHOBE »

Il faut bien que quelqu’un reconstruise après que tout ait été détruit. Pour l’actuel président de la République de Côte d’Ivoire, c’est le premier chantier auquel il s’est attaqué dès sa prise de pouvoir: la reconstruction à tous les niveaux. «Donc, notre premier objectif était d’apporter la sécurité au pays. Une fois que cela a été réalisé, nous avons dû revenir aux fondements de la bonne politique économique. Il s’agissait notamment de rétablir un système démocratique qui avait souffert sous la politique ethnique de Gbagbo [et] où seulement 5 pour cent de la population détenait le contrôle de l’armée et de la police», a-t-il fustigé. Puis Ouattara de regretter que «la plupart des industries appartenaient aux Français et beaucoup d’entre elles ont été vendues aux Libanais après que les Français aient été chassés par Gbagbo en 2004». Pour lui, il n’était pas question que son équipe gouvernementale verse également dans le tribalisme ou l’exclusion qui a caractérisé celle de Gbagbo, comme il le présente plus haut. «Nous avons appris de l’expérience américaine en Irak. Nous n’avons pas renvoyé toute l’armée, mais nous avons engagé un vaste processus de Ddr (Désarmement, démobilisation et réinsertion). La réintégration de la milice a été facilitée par la croissance économique que nous avons connue», se félicite-t-il. Mais, en même temps, il reconnaît que tous les problèmes n’ont pas été adressés, ou pas suffisamment. De sorte que la souffrance des Ivoiriens perdure jusqu’à ce jour.  »Ouattara admet que les choses sur le «front social» ne se sont pas aussi bien passées que sur les fronts économique et sécuritaire. Un autre «point faible», admet-il, se trouve dans le système judiciaire », commentent les auteurs de l’ouvrage. Et la réconciliation, dit-il, «ne s’est pas déroulée comme je l’aurais souhaité». Quand il s’est agi de faire un clin d’œil au peuple ivoirien quant à sa participation, sans nulle doute, à l’effort de reconstruction économique, le président de la République dira ceci: «Les Ivoiriens n’ont pas eu l’esprit orienté vers les affaires, dans le passé. Le pays vivait du cacao, de l’agriculture et de l’intermédiation logistique (…)», attirant ainsi leur attention sur le fait que la Fonction publique ne peut absorber tout le monde et qu’il faut qu’ils s’inscrivent dans la dynamique de l’auto-emploi. Puis, à l’endroit de ceux des Ivoiriens qui ont pu se démarquer de la première caté- gorie, qu’il fustige plus ou moins, le chef de l’Exécutif note que «bien qu’il y ait des incitations pour encourager les entreprises locales à participer aux appels d’offres», lui ne croit pas en «l’institutionnalisation d’avantages pour favoriser les habitants. Ce type de régime va à l’encontre de mes principes en tant que libéral».

CE QU’IL PRÉCONISE POUR LE DÉVELOPPEMENT DES PAYS AFRICAINS 

Au-delà de la Côte d’Ivoire, le président ivoirien a tenu à partager trois  »leçons » de gouvernance avec ses pairs africains. En la matière, il dira que «la première [leçon] est que vous devez vraiment travailler dur. Je suis désolé de dire que dans de nombreux pays, les dirigeants ne sont là que pour essayer de faire plaisir aux gens. Au lieu de cela, ils doivent faire attention aux détails et gérer le pays comme une entreprise». Comme deuxième leçon, il affirme que le succès dépend d’un processus ouvert qui nécessite de déterminer ce que les gens veulent et d’ajuster les politiques en fonction. En troisième point, il attire l’attention des dirigeants du continent noir sur l’importance pour les économies africaines de renforcer leurs systèmes de liberté, y compris les institutions qui s’inscrivent dans cette dé- marche, et la liberté d’expression qui accompagne l’innovation et le développement. «Cela nécessite une opposition forte mais disciplinée, qui fait partie de ce processus», concède-t-il. Le grand défi de l’Afrique, relève le président ivoirien,  »consiste à faire en sorte que les jeunes ne soient pas découragés ». «Je pense que j’ai eu beaucoup de chance. Je dis toujours à mes ministres que le fait d’avoir travaillé pour une organisation comme le Fmi (Fonds monétaire international, ndlr) m’a aidé, un lieu où la qualité et la compétence sont importantes et les performances peuvent être mesurées (…) Avoir été aux États-Unis dans le cadre de mes études et, plus tard aussi, dans le cadre de ma carrière, a également aidé à façonner mes points de vue sur la politique libérale et la démocratie. Ces deux attributs sont essentiels pour les Africains», s’est exprimé Alassane Ouattara.
Imatin.net