LG, un Homme d’Etat sans haine

C’est pourquoi il nous manque
Neuf ans après, Laurent Gbagbo a enfin parlé. Depuis Bruxelles, la capitale belge, où il est obligé de ronger son frein. Pourtant, il n’a eu aucun mot déplacé à l’encontre de ses tortionnaires et de tous ceux qui tentent de le rabaisser durant les trente huit minutes qu’a duré l’entretien, alors qu’il aurait été légitime de répliquer à tant d’humiliations, de méchancetés et de petitesses.
C’est quoi un homme d’Etat si ce n’est qu’il doit sacrifier son égo, ses pulsions d’autant plus normales qu’elles sont humaines et ses attentes légitimes au profit de l’intérêt général et de la paix fortement menacée aujourd’hui ? Laurent Gbagbo est donc en tout point un homme d’Etat dont la dimension transcende celle de tous ceux que l’on présente ainsi, et parfois abusivement d’ailleurs, à cause de son discours qui apaise, calme, éduque, recherche constamment ce qui est bien pour le plus grand nombre. Il n’a eu aucune rancœur, pas de haine et pour cela, il n’y eut aucune diatribe vengeresse contre Alassane Ouattara, le premier de ceux qui le vouent aux gémonies et dont le projet manifeste est de l’empêcher de rentrer chez lui en Côte d’Ivoire.
L’ancien président ivoirien a d’ailleurs expliqué qu’il aurait pu prendre le passeport d’un autre pays et rentrer en Côte d’Ivoire mais il ne veut pas de tensions supplémentaires. A quoi bon en effet ? La seule présence d’Alassane Ouattara est déjà un motif de crispation et de tensions politiques récurrentes. Lui dont la voracité est sans limite puisque ce qu’il promet maintenant est de ne pas être candidat en 2025, alors qu’il avait déjà promis une chose et son contraire pendant dix ans dont deux totalement contradictoires et surréalistes en trois petits mois. A la différence, Laurent Gbagbo cultive son rapport à la parole donnée, à la démocratie, à la morale et au respect des règles parce que c’est cela qui permet de réguler une société de manière efficace, dit-il. Et c’est pourquoi, il a appelé à la négociation et au rassemblement dans cet entretien malgré l’imposture manifeste de celui qui veut passer en force et dont les appétences ont déjà fait passer de vie à trépas 70 personnes. Le mensonge court vite, dit l’adage avant de se faire rattraper par la vérité qui n’est jamais pressée. Mais ce que l’histoire politique de la Côte d’Ivoire de ces dix dernières années nous montre va bien au-delà de cette vérité. A savoir que le discours de ceux qui sont au pouvoir rationalise la pensée et la logique criminelle comme un moyen d’accession au pouvoir. Leurs auteurs qui gagent des spadassins et des microbes ou autres repris de justice n’ont ainsi rien à envier aux parrains de la drogue ou de la mafia sicilienne.
Voilà pourquoi Gbagbo nous manque autant. Car avec lui, on apprend à être chaque jour plus humain qu’on ne l’est déjà, à pardonner à l’adversaire et à avoir honte de vengeance. Avec lui, on est sûr d’aller à la réconciliation nationale après tant de meurtrissures et d’envies légitimes de vengeance.
Il nous tous apaisés le temps de cet entretien, même si dès demain, nous devrons déjà revenir à la réalité que ce pays est dirigé par un homme qui ne se donne aucune limite et qui nous guide immanquablement vers la catastrophe.
Joseph Titi Gnahoua
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