Jean Yves Dibopieu revient sur son arrestation et sa détention
Jean Yves DIBOPIEU , Ex SG de la FESCI : » C’est fondamental, pour moi le silence dans lequel je me suis volontairement abstrait obéit à un principe. Je venais de traverser beaucoup de choses. Et dans la vie d’un homme quand vous êtes à ce stade, il y a lieu de faire un bilan pour voir vous-même, de réfléchir vous-même avant de vous réengager dans quoi que ce soit.
Abéhi et moi avons été arrêtés par des agents des forces de l’ordre Ghanéens. J’ai reçu un coup de fil du grand frère Abehi qui avait demandé que je vienne l’accompagner et quand je suis arrivé sur le lieu du rendez vous, dès que le portail du domicile où nous allions s’est ouvert et derrière s’est refermé. C’est ainsi que des hommes se sont jetés sur nous. J’ai entendu Abéhi crier un nom dont je n’ai pas souvenance, comme si cette personne venait de le trahir. Une vingtaine environ de personnes et au fur et à mesure qu’on se débattait, leur nombre grossissait. Nous avons été dépouillés de tous nos biens. Du point d’arrestation, nous sommes allés directement dans le bureau du renseignement Ghanéen. De là, on nous a convoyés directement à bord de 4×4, encadrés par des agents Ghanéen jusqu’à à la frontière ivoirienne où nous avons été remis aux forces de l’ordre ivoiriennes.
J’ai passé 16 mois en prison, des mois difficiles où j’ai été traité comme un animal dans une prison spéciale que je considère comme un enlèvement parce qu’aucune personne n’est venu me rendre visite durant toute cette période de détention. J’ai fais trois différentes prisons, d’abord dans les profondeurs de la Dst ensuite ou j’ai passé plus de 09 mois ou l’homme est censé être détenu pendant 48 h puis 05 mois et demi dans un endroit plus clos avec Amadé Ourémi, plus tard j’ai été expédié manu militari au camp pénal de Bouaké. C’est de là-bas que j’ai été libéré. J’ai été sincèrement maltraité et je ne pourrai pas rentrer dans les détails. J’ai été torturé. Quand on menotte un prisonnier pendant 08 jours, enfermé 24 h sur 24 h. je suis le seul prisonnier à n’avoir jamais reçu de visite durant toute ma période de ma détention.
J’ai été approché une fois par Mme la doyenne des juges dans le temps qu’on appelait Mme Cissé Macroni dans les locaux de la Dst, c’est là-bas qu’elle va me signifier les chefs d’accusations portés à mon encontre. J’étais coupable de détournements de deniers publics, ce sont les mêmes chefs d’accusations classiques et standards imputés aux pros Gbagbo. (…) à la Dst je prenais mes repas dans un sachet et dormait à même le sol. Au point de me demander si j’étais en Côte d’Ivoire.
Justement un matin alors que j’étais dans ma cellule, le régisseur adjoint du camp pénal est venu me dire que j’avais de la visite. Je lui ai demandé qui c’était, on ne m’a rien dit. En plus, il me demandait de ranger mes affaires. On a discuté et comme il a vu que je lui posais assez de questions, il a fait appel au régisseur qui lui-même m’a informé de ma remise en liberté par injonction du ministre de la justice.
Je suis la personne la plus peinée quand à la question de déportation de nos compatriotes. Laurent Gbagbo est la seule personnalité politique pour laquelle j’ai engagé des activités politiques donc je suis peiné. C’est ce monsieur qui se retrouve de l’autre coté. Charles Blé Goudé est un collaborateur très proche. De tous les secrétaires généraux qui m’ont précédé à la tête de la Fesci, il a été le seul avec lequel j’ai été beaucoup plus proche. Le pouvoir doit assumer le bilan négatif de la déportation d’ivoiriens pour être jugés hors de leur pays. Je condamne avec la dernière énergie. Le procès nous a démontré après 80 témoignages que Laurent Gbagbo est innocent. Il faut que façon courageuse la communauté internationale notamment la France décrète la libération du président Gbagbo. L’honnêteté politique, juridique aurait voulue qu’on mette ce monsieur en liberté. L’issu est heureuse pour nous. Il n’y ait pas de raison que Gbagbo et Blé ne soient pas libérés. »