effondrement sans restauration
EN VERITE : QUAND LES PILIERS S’EFFONDRENT
J’ai éprouvé de la pitié pour la Côte d’Ivoire, mon pays, lorsque j’ai regardé cet enregistrement vidéo de Guillaume Kigbafori Soro qui a récemment fait le tour de la toile. Rusant de faire pitié, Soro déclarait ceci : « …le petit poste de président de l’Assemblée nationale que j’ai, si on me le redonne je serai content ». Voici le niveau atteint par le marchandage de tapis pour des postes au sommet de l’Etat. Ne voyant pas venir les choses, comme il fallait s’y attendre, les chiens de guerre de la rébellion qu’il a pilotée pour porter Ouattara au pouvoir sont entrés en action. Les kalachnikovs, ce qu’ils ont appris le plus à manipuler, ont fait entendre leurs cliquetis partout dans le pays. Les hyènes sauvages, on le sait, n’ont qu’un seul destin : « chasser pour vivre et vivre pour chasser ». Place nette a été donc faite à la surenchère. Toutes affaires cessantes, le « petit poste » de président de l’Assemblée nationale a été cédé à 95 % des suffrages à Soro. 42.5 milliards d’espèces sonnantes de la tirelire du contribuable ivoirien seront débloqués à la vitesse de la lumière et 59.5 autres milliards de nos francs suivront les mois prochains. « le capitalisme a toujours tiré son nectar du crâne de ses victimes ». Tout ce manège digne des films western se déroule sous les yeux hagards d’une population ivoirienne apeurée.
Quand les Américains et la CIA organisaient et entrainaient des terroristes et autres talibans en Afghanistan, dans leur guerre contre l’URSS, ils étaient loin d’imaginer qu’un jour le meilleur élève Ben Laden se retournerait contre eux, ses maîtres ; Ils étaient loin de penser qu’ils installaient ainsi les fondements de l’Etat islamique. Aujourd’hui, avec le rempart de Mouammar Kadhafi rompu, la Lybie est devenue une poudrière et le cancer s’est généralisé. C’est à cela que nous assistons en Côte d’Ivoire.
En plein jour, 8 400 rebelles, viennent de braquer et prendre en otage l’Etat de Côte d’Ivoire. Lourdement armés ils ont encore renforcé leur armement en vidant plusieurs poudrières pour emporter 102 milliards de FCFA de butin. Mais si vous pensez qu’il s’agit simplement d’une banale affaire de grades, de sous et de villas, révisez votre jugement. Il s’agit de l’effondrement des piliers de notre état.
Dans le domaine de la construction justement, les piliers sont des organes architecturaux de maçonnerie qui jaillissent d’une fondation pour recevoir et soutenir une charge faite de voûtes, charpentes ou arcades. Toutes les sociétés humaines sont organisées à l’image de ces constructions. Elles reposent sur des piliers. Lorsqu’ils sont vermoulus et fortement secoués à l’image de ce que fit Samson des Ecritures saintes, c’est tout l’édifice qui s’écroule inexorablement sur tous ses occupants.
L’intégrité et la tranquillité de l’état, piliers de la nation sont en périls pour longtemps. Désormais quelques soudards armés peuvent décider du point cardinal où doit se lever le soleil dans notre pays.
L’égalité des citoyens, devant les lois et règlements, à disposer des mêmes chances dans la société, piliers essentiels dans une république démocratique, est mise à mal. Ceux que les Ivoiriens subissent aujourd’hui disaient autrefois avoir pris les armes pour lutter contre l’exclusion. La composition des membres du nouveau gouvernement, les nominations aux emplois supérieurs de l’Etat, la liste des admis au concours des inspecteurs de l’enseignement préscolaire et primaire de 2014 et récemment, la liste des admis au concours de la police nationale, les marchés gré à gré aux copains, coquins et cousins consacrent une véritable déchéance. « On dirait que c’est une zone géographique seulement aujourd’hui qui a été à l’école dans ce pays. Ils sont les seuls à réussir aux concours. C’est inadmissible », s’exprimait à ce sujet Gnamien Konan, ministre expulsé fraichement des entrailles du RHDP. Que dire de l’état de notre appareil judiciaire, de l’économie de prédation, de la corruption généralisée, de la déliquescence de l’état de droit et des libertés!
La sédimentation des frustrations est telle que la population ivoirienne n’a plus d’autres choix. Au risque d’être ensevelie, elle est condamnée à lever les yeux et à engager la lutte de restauration des différents piliers de l’édifice ivoirien.
Aristide SILUE
(In –la voie originale N-068 du 17 janvier 2017 P-2)
communiqué par Claude Nda Gbocho