CPI, derrière les murs…
Les différentes révélation faites par Mediapart dans le courant d’octobre 2017, continuent de faire des effets sur l’administration et le fonctionnement de la Cour pénale internationale (Cpi). Autrement dit, la Cpi est très tourmentée par cette affaire qui a pratiquement jeté le discrédit sur elle.
En témoignent les changements qui s’opèrent dans cette juridiction internationale depuis la publication des différents scandales sur cette institution. Après la suspension de deux fonctionnaires du Bureau du procureur en octobre dernier, à la suite de ces révélations en rapport avec le montage grossier relatif à l’arrestation du Président Laurent Gbagbo, les responsables de la Cpi continuent de prendre des décisions visant à soigner l’image de cet appareil de justice internationale. En effet, réunis en seizième session de l’Assemblée des Etats parties au statut de Rome depuis le 4 décembre 2017 et qui prendra fin le 14 décembre, les 123 pays ayant adhéré officiellement à la Cpi ont tout bouleversé au sein de l’institution internationale.
Selon de bonnes sources, ce bouleversement serait en rapport avec les critiques et autres révélations faites sur des anciens et actuels agents de la Cpi. Lors de cette Assemblée, le Juge O-Gon Kwon (de la Corée du sud) a été nommé au poste de Président, en remplacement du sénégalais Sidiki Kaba, pour un mandat de trois (3) ans à compter du 15 décembre 2017. L’Assemblée en a aussi élu, pour la même période, les membres du Bureau de l’Argentine, l’Australie, l’Autriche, la Colombie, la Côte d’Ivoire, le Danemark, l’Équateur, l’Estonie, l’État de Palestine, la France, la Gambie, le Ghana, le Japon, le Mexique, l’Ouganda, les Pays-Bas, le Sénégal, la Serbie, la Slovaquie et la Slovénie. Les pays membres ont en outre, choisi six (6) nouveaux juges qui font leur entrée au sein de l’institution. Il s’agit d’un homme et cinq (5) femmes dont deux (2) Africaines.
Logiquement les vice-présidents devraient également être désignés au cours de cette réunion. Mais cette élection a été ajournée. «L’Assemblée a élu M. le Juge O-Gon Kwon (République de Corée) au poste de Président pour un mandat de trois (3) ans à compter du 15 décembre 2017. Elle a en outre élu, pour la même période, les membres des Bureaux suivants : l’Argentine, l’Australie, l’Autriche, la Colombie, la Côte d’Ivoire, le Danemark, l’Equateur, l’Estonie, l’État de Palestine,la France, la Gambie, le Ghana, le Japon, le Mexique, l’Ouganda, les Pays-Bas, le Sénégal, la Serbie, la Slovaquie et la Slovénie. L’Assemblée a reporté l’élection des deux Vice-présidents. Elle a également élu six juges pour une période de neuf ans», indique la Cpi sur son site internet. Les nouveaux juges sont : L’Italien Aitala Rosario salvatore (Groupe des Etats d’Europe occidentale, Italien, liste A), la Japonaise Akane Tomoko (Groupe des États d’Asie et du Pacifique, liste A), la Béninoise Alapini-Gansou Reine Adelaide Sophie
(Groupe des États d’Afrique, liste B), L’Ougandaise Bossa, Solomy Balungi (Groupe des États d’Afrique, liste A), La Péruvienne Ibáñez Carranza Luz del Carmen (Groupe des États d’Amérique latine et des Caraïbes, liste A) et la Canadienne Prost Kimberly (Groupe des États d’Europe occidentale et autres États, liste A). «Les juges de la liste A ont une compétence reconnue en droit pénal, tandis que les juges de la liste B ont une compétence reconnue dans les domaines pertinents du droit international, notamment le droit international humanitaire et les droits de l’Homme. L’Assemblée a également élu six membres du Comité du budget et des finances, pour un mandat de trois ans…», informe le site de la Cpi.
«L’Assemblée examinera également, entre autres, des propositions d’amendement du statut de Rome, débattra de l’extension de la compétence de la Cour au crime d’agression et étudiera le budget de la Cour pour 2018», ajoute le document publié à cet effet.
Ce qu’ils ont dit à l’ouverture de l’Assemblée
Lors de cette Assemblée des membres des Etats parties, il y a eu des interventions. Notamment celles de Sidiki Kaba (le président sortant), d’António Guterres (le secrétaire général de l’Onu), de Motoo Noguchi (le président du Conseil de direction du Fonds au profit des victimes), de la juge Silvia Fernández de Gurmendi (la présidente de la Cpi) et la Gambienne Fatou Bensouda (la procureure de la Cpi).
Dans son discours d’ouverture, le président de l’Assemblée a appelé les Etats à travailler à la ratification universelle du statut de Rome et à l’intégration de ses normes dans les systèmes juridiques nationaux. Il a aussi souligné le lien entre la coopération des Etats et l’efficacité, la crédibilité et l’indépendance de la Cour. «Il nous faudrait assigner une nouvelle mission à la Cour : celle d’une inactivité progressive résultant d’une gigantesque récession des crimes de masse dans le monde. Si une telle utopie advenait, nous aurions alors annoncé l’aube d’une nouvelle espérance pour l’humanité…», a-t-il indiqué. En ce qui concerne le secrétaire général de l’Onu, il a observé que «l’adoption du statut de Rome aura été un moment plein d’espoir, un moment historique, à la fin d’un siècle caractérisé par des atrocités et une inhumanité innommable. Et pourtant, de graves violations du droit international se poursuivent, les lacunes en matière de responsabilité sont nombreuses. Notre défi permanent consiste à réaliser le plein potentiel de la Cour, pour mettre un terme à l’impunité et édifier un monde plus juste et plus pacifique ». Quant au président du Conseil de direction du Fonds au profit des victimes, il a fait observer l’importance des premières réparations au profit des victimes ordonnées par la Cour et mises en oeuvre par le Fonds.
Intervenant en dernier ressort, la présidente et la procureure de la Cpi se sont également exprimées devant l’Assemblée. «Cette Assemblée offre un espace idéal, pour engager un dialogue constructif ouvert à tous, un dialogue auquel la Cour souhaite également contribuer. En effet, comme je l’ai mentionné l’an dernier, la Cour est disposée à entendre toutes les vues et préoccupations, sans toutefois compromettre son indépendance judiciaire qui doit être toujours préservée. En tant qu’institution judiciaire, la Cour est une organisation internationale d’une nature différente. son indépendance de toute influence extérieure est essentielle pour assurer son identité, sa crédibilité et sa légitimité…», a souhaité la présidente de la Cpi. «(…).
Les enquêtes se poursuivent en ce qui concerne la situation au Darfour, en Côte d’Ivoire, en République centrafricaine et en Géorgie. Nos poursuites sont en cours contre quatre accusés, en plus des activités d’appel considérables concernant, entre autres, l’affaire principale impliquant M. Jean-Pierre Bemba ainsi que l’article 70 des affaires découlant de la même affaire. (…) Les résultats des activités de mon Bureau concernant la situation au Burundi et L’Afghanistan illustrent les progrès accomplis. Ces situations sont, en effet, un signe de la nature et de l’ampleur de nos activités en constante évolution, et de notre engagement indéfectible à notre mandat, en vertu du statut… », a affirmé la procureure. «Nous ne sommes pas aujourd’hui à un carrefour sur l’avenir de la coopération internationale de justice criminelle.
Au contraire, la justice pénale internationale est en marche. La Cour, pour sa part, respecte de plus en plus sa promesse de contribuer à l’émergence d’un ordre mondial basé sur la loi, où de plus en plus le message est – pour citer l’ancien secrétaire général de l’Onu, M. Kofi Annan, au moment de l’adoption du statut de Rome en 1998: ‘’aucun dirigeant, aucun État, aucune junte et aucune armée n’importe où’’ peuvent abuser des droits de l’homme et commettre des atrocités en toute impunité. Ce qui est requis aujourd’hui plus que jamais, c’est une plus grande reconnaissance de la nécessité de renforcer la Cour et le système en évolution de la justice pénale internationale…», a-t-elle ajouté.
Dupont Antoine