Déclaration Balfour, la violence du texte
Le contexte :
Cette lettre, plus connue sous le nom de Déclaration Balfour, a aujourd’hui 100 ans. Cet anniversaire fait polémique puisque beaucoup pensent que la déclaration Balfour a exacerbé les rancœurs et tensions entre Juifs et Arabes, et est en partie responsable du conflit israélo-palestinien.
Dans un discours à l’Assemblée générale des Nations unies, en septembre dernier, le président de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, a demandé aux Britanniques des excuses officielles pour avoir promis de remettre des terres que le Royaume-Uni ne possédait pas. Une demande soutenue par l’élu britannique Emily Thornberry, la responsable des affaires étrangères au sein de l’opposition travailliste, qui appelle le Royaume-Uni à reconnaître officiellement l’existence de l’Etat de Palestine pour marquer le centenaire.
Mais Londres refuse. Et la Première ministre Theresa May annonce dans la foulée qu’elle célébrera cet anniversaire avec son homologue israélien Benyamin Netanyahu qu’elle a d’ailleurs invité à Londres pour participer à la commémoration. Le geste ne plaît guère aux Palestiniens qui ont toujours condamné cette lettre, considérée par eux comme une injustice de l’histoire. (…)
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Voilà qui est fort, très fort même. Faire passer la Déclaration Balfour pour une “garantie juridique internationale” relève carrément de l’exploit conceptuel.
Bruno Guigue·
Merci pour cet article. Les « non-juifs » ne sont cependant pas une définition négative des Arabes. Outre qu’il y avait des juifs arabes, il y avait aussi des « grecs » (sens religieux) qui pouvaient être turcophones ou pas selon la date de la venue de leurs ancêtres, des Protestants allemands et de petites communautés linguistiques ou religieuses correspondant à des survivants d’ethnies très anciennement établies. Après la destruction d’une bonne partie de la population et de la société par Bonaparte le repeuplement s’est fait d’abord par l’installation d’Arabes musulmans, mais pas seulement. La Palestine était en fait assez diversifiée et au début de l’occupation anglaise le sionisme n’avait pas toujours ni pour tous le sens d’une exclusion. D’où la réserve de Balfour. Un exemple français, intéressant par son anticipation et le statut futur de Jérusalem:
LE SIONISME IL Y A UN SIÈCLE , au moment de la Conférence de Paris, un an avant celle de San Remo qui fixe le mandat anglais sur la Palestine.
« Cherchons une solution propre à rassurer tous les intérêts en présence. Son Excellence le cardinal Gasparri se demande si la ville du Christ… va demain faire partie de la nouvelle nation sioniste. Nous répondrons : Non ; ni l’Angleterre, préposée par le conseil des Dix à la tutelle de la Palestine – ni la France éventuellement, si ledit rôle lui échoit – n’annexeront Jérusalem au judaïsme. Car, si la cité de David contient une majorité juive, elle n’en renferme pas moins une forte minorité arabo-musulmane et de petits groupes de diverse appartenance. Donc, un conseil municipal mixte.
Jérusalem va-t-elle cesser de rester la capitale de la Palestine, c’est-à-dire d’un Etat mixte, où se coudoieront les établissements juif, musulman et chrétien ? La balance, en ce moment, penche en faveur des seconds (les Musulmans) ; mais supposons que, en cinquante années, l’équilibre soit renversé au profit des premiers (les Juifs), qu’en résultera-t-il ? Rien. La donnée essentielle du groupement, c’est-à-dire la juxtaposition des races et des religions se maintiendra… au bas mot pendant plusieurs siècles.
(…)
Donc, faisons à Jérusalem ce qu’à Rome l’Italie a tenté par la loi des Garanties. Bornons-nous à exterritorialiser les Lieux Saints de toutes les confessions, le Mur des Lamentations et la Mosquée d’Omar, à Jérusalem, comme le Saint-Sépulcre, ou comme l’Eglise de la Nativité à Bethléem, à Nazareth, à Hébron et en d’autres lieux, etc., en tenant compte particulièrement des souvenirs augustes qui s’attachent à l’Eglise catholique romaine sous le patronage illustre et auguste de la France ; et qu’un esprit de paix et de charité confonde dans le culte de leurs pieux souvenirs les croyants de toutes les confessions !
Que les querelles pénibles qui appelaient constamment l’intervention de la police turque à Jérusalem lors des fêtes de Pâques cèdent la place à une fraternelle émulation ! Que chacun se sente, sous un régime de paix et de justice, garanti par la Ligue mondiale des nations, le frère de celui qui invoque Allah, Yahvéh ou le Christ comme de celui dont les lèvres prononcent avec respect le nom du réformateur Jésus, le libérateur des servitudes antiques, l’ami du peuple et des pauvres gens ! »
Maurice VERNES
Président de la « Ligue des Amis du Sionisme »
Publié dans « Le Peuple Juif », hebdomadaire sioniste français – Pâques 1919
Pierre-Michel Minjoz