Dr Clark. C’est un expert médico-légal et spécialiste dans l’interprétation des lésions et la détermination de la cause du décès

Par Marcel Dezogno
L’audience du lundi 11 septembre 2017 à la Cour pénale internationale (Cpi) a vu comparaitre à la barre Dr Clark. C’est un expert médico-légal et spécialiste dans l’interprétation des lésions et la détermination de la cause du décès. Il comparaît dans le cadre du procès conjoint Gbagbo-Blé Goudé. En qualité de nouveau témoin de Fatou Bensouda, l’expert a déclaré avoir pris part à l’autopsie de certains corps issus de la crise postélectorale de 2010.
En ce qui concerne les évènements du 3 mars 2011 en rapport avec la marche des femmes à Abobo, le témoin a révélé dans son rapport que trois des corps qu’il a autopsiés, ont visiblement reçu des balles dans le dos ou de profil et non de face.

«Ce qu’il faut remarquer sur les trois corps autopsiés, c’est que les lésions sont localisées au niveau de la nuque, du cou et de l’épaule. Les blessures ont été causées par des balles venues de la droite pour atteindre le côté gauche. Tout se passait autour de la nuque et de l’épaule », a soutenu Dr Clark. Pour illustrer sa thèse, il a expliqué que ce jour-là, les forces de l’ordre dans un convoi allaient dans le sens contraire de ces femmes. Et que logiquement, les balles qu’elles auraient reçues devraient provenir de face et non dans le dos ou de profil, comme l’indique l’expert médico-légal. C’est ainsi que pour le premier corps de la marche des femmes qu’il a autopsié, le témoin indique qu’il n’a pas participé à l’analyse Adn de dame Sylla. Et qu’il n’a pas vu les résultats de cette analyse. En revanche pour un autre corps, dame Ouattara Rokia, Dr Clark fait de grandes révélations : «Le corps avait été bien conservé alors que le décès a eu lieu il y a 4 ans. J’ai été absolument surpris de la bonne conservation. Mais ce n’est pas la première fois que je constate cela. On ne comprend pas pourquoi certains corps se conservent mieux que d’autres ». Tout comme l’expert explique que dans le cas de Koné Mouyamou, le troisième corps autopsié, « Le corps a été placé dans un récipient rempli de formol. Parce qu’il n’y avait pas de traces d’injection sur le corps. Je pense que la mort a été causée par une blessure par balle dans la nuque et dans l’épaule droite. Mais je ne suis pas sûr à 100% de la cause de son décès », indique Dr Clark.

Dans la relation des faits, le témoin dit avoir en janvier 2015, effectué une première mission d’autopsie en Côte d’Ivoire. Au cours de laquelle, il a réalisé des autopsies sur dix corps liés également à la crise de 2010. Il a travaillé avec le docteur Yapo Etté Hélène et son adjoint, Dr Djodjo, les médecins légistes Baccard et Sabina Zanetta du bureau du procureur. «Les dix corps n’avaient pas été identifiés du point de vue scientifique. Pour la plupart, la cause du décès était inconnue», a-t-il conclu dans son rapport.

Pour la défense du président Gbagbo, dans un tel contexte, la partie concernant ces dix corps dans le rapport global du témoin, ne doit pas être admise au dossier par la Chambre. Argument partagé par le procureur, Djemerdjian. « Nous ne savons pas à qui appartiennent ces corps. Donc, il n’y a aucun problème s’ils ne sont pas versés au dossier », dit-il. Le procureur est rejoint par le juge-président. « Ils sont considérés comme n’ayant pas été versés au dossier. Les parties se rapportant aux dix corps, ne sont pas prises en compte par la Chambre », rassure Cuno Tarfusser. Face à Maître Dov Jacobs de la défense du président Gbagbo, le témoin révèle à la cour que : « Je n’avais pas les dossiers médicaux des personnes autopsiées. Je n’ai pas non plus vu leurs certificats de décès et permis d’inhumer ».

L’avocat du président Gbagbo demande au témoin les raisons pour lesquelles, il a omis de mentionner dans son rapport global d’autopsie les photos et vidéos concernant la marche des femmes à Abobo le 3 mars 2011. « Je n’ai pas mentionné les vidéos et photos parce que cela n’a pas eu une grande influence sur mon rapport. Nous avons eu deux ou trois jours pour préparer ces rapports étant donné les circonstances. Je n’ai pas le temps de regarder toutes ces photos. Le professeur Yapo Etté Hélène devant quitter le pays pour des vacances, nous devions terminer rapidement pour qu’elle signe le rapport avant son départ. C’est avant de venir ici que j’ai étudié en détail ces photos et vidéos. Mais, cela étaye ma conclusion », se défend-t-il.

Comme pour les dix autres corps, Dr Clark soutient n’avoir pas reçu les dossiers médicaux encore moins les certificats de décès des trois corps issus de la marche du 03 mars 2011 qu’il a autopsiés. « Concernant le corps de Ouattara Rokia, j’ai oublié de mentionner dans mon rapport que son corps a été conservé dans une chambre froide. Ce qui est inhabituel », révèle le témoin. Alors que le certificat médical indique que Ouattara Rokia serait morte des suites d’un traumatisme crânien balistique à la suite de la marche des femmes à Abobo, l’expert médico-légal soutient le contraire dans son rapport. «Ce n’est pas le cas. Aucune blessure par balles n’a été causée au niveau du crâne. Et j’aurais mentionné sur le certificat médical, le lieu du décès et non le contexte politique. Je n’aurais pas formulé les choses ainsi », explique le témoin. Pareil pour le corps de Sylla. Le certificat médical lu par la Défense prétend qu’elle serait morte des suites d’une plaie traumatique crânienne balistique. Faux, rétorque l’expert. « Si on suppose que la totalité du crâne appartient au corps de Sylla, alors que ce j’ai constaté est contraire au résultat du certificat de décès », soutient Dr Clark. En plus, il rappelle que : « Rien n’indique que la balle provient du corps que j’ai autopsié. Donc je ne fais qu’observer les faits sur ce cas. Je n’ai rien basé là-dessus. Je n’ai pas pu déterminer comme pour les autres, la date exacte du décès ». Interrogé par Maître Alexanders Knoops, Dr Clark a souligné avoir inscrit dans son rapport global que : « Aucun éclat d’obus n’a été trouvé sur huit corps autopsiés. Il se peut qu’on ait utilisé un détecteur de métaux sur les corps provenant de la marche du 03 mars 2011, mais, nous n’avons rien trouvé comme métal sur ces corps ». Son audition s’étant achevée, juge-président a annoncé pour ce mardi 12 septembre, le passage du témoin P.364 pour être entendu par la Cour et touts les partis au procès.
leTempsinfos.com