Cameroun— Cameroon Telecommunications au cœur d’une Bataille géostratégique
Les grandes entreprises Camerounaises—Eaux, Energie, Transport ferroviaire… dévorées, seule reste la Cameroon Telecommunications—CAMTEL, l’opérateur national de téléphonie. Cependant, priver le Cameroun de cet outil de contrôle de son réseau de communications est au centre des cellules occidentales de recolonisation du Continent. Plusieurs études ayant pour objectif déclaré de “trouver les moyens de promouvoir le plaidoyer pour un accès abordable des populations Africaines aux Technologies de l’Information et de la Communication—TICs” ont été commandées et financées par l’occident, puis exécutées par la main d’œuvre Africaine. Un mécanisme subtil d’assimiler les recommandations de ces études aux conclusions dictées en amont à l’expertise Africaine.
Conclusions orientées
L’ensemble de ces études dressent un tableau alarmant de l’espace des télécommunications du Continent. Le Cameroun n’y échappe pas. Le diagnostic des experts(?) y présente une faible couverture du territoire. Donc un faible accès de la population tant au fixe qu’au mobile. Le nombre de lignes téléphoniques pour 100 habitants—télédensité—est estimée lors de la réforme de 1999 à 0,54. Plaçant le Cameroun selon le classement de l’Union Internationale des Télécommunications (UIT) au 179e rang sur 206 pays. Cette télédensité une dizaine d’année plutard est évaluée à près de 2%.
L’exigence de la restructuration de ce secteur a entre autres objectifs “la fourniture et la mise à disposition de tous d’un service de base, d’une qualité requise, à un prix abordable sur l’ensemble du territoire,” avec une attention particulière aux zones rurales éloignées. Leur déduction accorde une place primordiale aux opérateurs étrangers de téléphonie mobile pour relever le taux de télédensité en étendant les réseaux afin d’accroître le volume des lignes et satisfaire la population/cliente. Une analyse qui s’est avérée fausse sur le terrain. Les zones rurales mêmes celles non-éloignées de certains centres urbains ont des offres de mauvaise qualité surtout en provenance de Orange.
Leçon coloniale retenue par Ahidjo
Le système communicationnel Camerounais que les rapaces s’évertuent à dépecer a subi une longue mutation depuis l’époque coloniale. Pendant deux décennies à partir des années ’60, l’expertise de la Compagnie Française de Câbles Sous-marins et de Radio (FCR) filiale de France Télécom, a assuré l’ingénierie d’une grande partie du réseau de télécommunications Camerounais. Au cours de ces années, FCR exerce sa connaissance en transmission des données radio pour aider l’Administration du président Ahmadou Ahidjo à traquer les résistants Camerounais de l’Union des Populations du Cameroun(UPC).
Cette expérience convainc les autorités Camerounaises sur la portée stratégique des télécommunications dans la sécurisation d’une nation et de son rôle comme facteur déterminant au plan économique.
Outils de l’Indépendance télécommunicationnelle Camerounaise
Alors, le gouvernement œuvre pour l’indépendance télécommunicationnelle du Cameroun. L’Ecole Nationale Supérieure des Postes et Télécommunications(ENSPT)est créée en 1969 à Yaoundé. Elle a pour mission de former des techniciens supérieurs et des ingénieurs en télécommunications. Ces derniers devant prendre le relais des experts Français d’une part, et produire d’autre part, la contre-expertise des expertises étrangères.
A ces experts, il faut donner un outil de travail. En 1972, INTELCAM est créé afin d’arrimer entre autres objectifs le Cameroun aux télécommunications internationales par satellite. Sur l’ensemble du territoire national, trente-quatre centraux téléphoniques sont installés. La loi N°87/021 du 17 Décembre 1987 portant création du budget annexe des Postes et Télécommunications octroie une autonomie financière au ministère des Postes et Télécommunications. Accélérant l’autonomie de ce secteur, la loi N°98/014 du 14 Juillet 1998 portant réglementation des télécommunications dans le Triangle Camerounais, crée l’Agence de Régulation des Télécommunications(ART). Marquant ainsi une frontière entre les fonctions de régulation et celles d’exploitation.
La loi N°2005/013 du 29 Décembre 2005 amende et complète certaines dispositions de celle N°98/014 du 14 Juillet 1998. Elle transforme le Fonds Spécial des Télécommunications(FST)en Compte d’Affectation Spéciale. La gestion de ce fonds précédemment confiée à l’ART est désormais sous sa nouvelle appellation remise au soin du ministère des Finances.
Poursuivant la restauration de ce secteur, CAMTEL, par décret N°98/198 du 08 Septembre 1998 voit le jour. Mandat lui est donné de mettre en place les infrastructures et les équipements adaptés aux télécommunications nationale et internationale. Dans cette mission, elle est chargée d’assurer l’étude, l’installation, l’exploitation et l’entretien de tout système nécessaire à la fourniture des services de télécommunications sur l’ensemble du territoire national, ainsi que la connexion des réseaux locaux ou nationaux aux réseaux étrangers.
Retour de France Télécom au Cameroun
Les lois et décrets qui réorganisent le secteur des télécommunications au Cameroun ouvre le marché aux firmes étrangères. Le Gouvernement et la Société Camerounaise de Mobiles(SCM) signent en Juillet 1999 une convention de concession pour l’établissement des réseaux de communication ouverts au public. Le capital de cette Société est détenu à 99.97% par FCR du groupe France Telecom. La valeur de la réimplantation de France Telecom au Cameroun pour une durée de 15 ans s’élève à 10.4 milliards FCFA—Des miettes. Parallèlement, Mobile Telecommunication Network (MTN) dont le capital social est détenu à 70% par MTN International et 30 % par la société Camerounaise Broadband Telecom, prend une part de ce marché le 15 Février 2000 pour une valeur de 40,635 milliards FCFA—quatre fois plus chère que la part Française attribuée dans des combines bizarres.
La société Française lance ses activités en Février 2000. Puis devient Mobilis avant de passer à Orange en Juin 2002, suite à l’acquisition en Mai 2000 de Orange par France Telecom. Toutes ces mutations-rachat répondent à un plan de retour de France Telecom au Cameroun pour des raisons plus géostratégique qu’économique au sens primaire.
Vautours Camerounais recrutés
Le marché libéré, des tractations en externe sont engagées pour que l’Etat Camerounais perdent le contrôle de son système de télécommunications. Les vautours internes sont mis en contribution. INTELCAM en bonne santé financière et sans problème de gestion, est mis à prix. Un appel d’offres est lancé en 1995, France Cable et Radio et AT& T, une firme Américaine, sont intéressées. La France spécialisée dans le passe-droits en Afrique coiffe son concurrent.
L’accord de cession est signé le 12 Juin 1996 par Titus Edzoa, ex-Secrétaire Général de la Présidence de la République. L’ex-Ministre des Postes et Télécommunications, Dakolé Daissalé annule cette concession. La première raison, pour garantir la souveraineté stratégique du Cameroun. La seconde, justifiée par une analyse de coûts comparatifs. L’accord de Edzoa cédait INTELCAM pendant 25 ans à la France pour une compensation de la dette Camerounaise de 35 milliards de FCFA auprès de la poste Française. Alors que l’exploitation de INTELCAM s’évaluait à plus de 200 milliards de FCFA.
INTELCAM devenue CAMTEL avec près de 140.000 lignes, de grands investissements en infrastructures satellitaires et autocoms est aussi à vendre. TELECEL est le potentiel repreneur. Ce consortium devra gérer toutes ces lignes, les centraux, les stations terriennes de Zamengoe à Yaoundé et de Bépanda à Douala. Mais sa fiabilité financière suscite des doutes. Il est d’ailleurs acheté par ORASCOM à 80% de ses actions. Les 20% restant c’est ce qu’il voudrait investir pour empocher CAMTEL. Ce qui fait réagir le Directeur Général Nguiamba qui se demande pourquoi on braderait CAMTEL qui marche bien aux étrangers véreux.
Le front diplomatico-économique du FMI
N’ayant pas pu atteindre cet objectif d’accaparement de INTELCAM/CAMTEL, la société TELECEL se retire, respectant la donne qui s’était imposé à elle. Mais la France, non. Elle met en marche d’autres manèges pour soumettre le Cameroun, voie de passage pour le Golfe de Guinée. Elle monte une armée de terroristes—Boko Haram. Ces tueurs ne pouvant résoudre l’équation Cameroun, les stratèges Français développent les thèses sécessionnistes et les mettent en action dans le Southwest/Northwest. Là aussi, ça ne prend pas. Christine Lagarde, la patronne du FMI, une Française, semble voler à son secours. En visite au Cameroun, elle demande que CAMTEL soit privatisée.
Les Français se heurtent à la détermination Camerounaise à ne pas liquider cet outil de souveraineté. France Telecom change d’angle d’attaque. Elle organise et entretient à travers Orange une situation de belligérance autour d’une facture de 1.6 milliards de FCFA pour services reçus qu’elle ne veut pas honorer. Elle vise par cette astuce à asphyxier financièrement son partenaire Camerounais.
Orange-Cameroun espionne déjà sans fibre optique
David Nkotto Emane, Directeur Général de CAMTEL veut cet argent pour sa Compagnie. Il sort Orange du réseau de fibre optique de CAMTEL en Octobre 2017. Celle-ci dénonce la position de monopole du fournisseur Camerounais. Dans un de ses communiqués, elle écrit que l’attitude de CAMTEL “relève d’un abus de position dominante dont elle dispose sur la fibre optique, et est de nature à entamer fortement la confiance qui doit régner entre les acteurs du secteur des télécommunications.” En clair, la France demande qu’à défaut de lui céder ce patrimoine Camerounais, qu’une partie au moins de l’exploitation du fibre optique lui soit accordée.
Pourtant, le Cameroun a créé un environnement concurrentiel sain. Mais la France veut absolument semer la confusion afin d’ajouter CAMTEL à sa liste des Sociétés de communications stratégiques—Port, Chemin de fer, voire Aéroport en partie—du Cameroun qu’elle contrôle déjà. Un tel coup s’il passe mettrait le Cameroun à nu. Déjà, sans mainmise sur la fibre optique, Orange espionne certains de ses usagers qu’elle a mis sur écoute. Puis transmet les données recueillies aux services d’espionnage et de contre-espionnage Français. A ce propos, la Une du quotidien L’Indépendant, du 24 Octobre 2017 titre, “Espionnage: Orange et les écoutes téléphoniques.” Puis éclaire. “la multinationale a la possibilité d’enregistrer les conversations de ses clients Camerounais et les mettre à la disposition des services secrets Français.” Un test pour ajuster le mouvement d’ensemble de la catastrophe que la France prépare au Cameroun.
Camtel au centre du contrôle des côtes Atlantiques Ouest et Centrale
L’évidence c’est que la France s’acharne sur le Cameroun afin d’exploiter sans contrepartie toute la route Atlantique allant des côtes Ouest dont les impérialistes sont maîtres depuis l’installation de Ouattara en Côte d’Ivoire, jusqu’aux côtes Atlantique Centrale.
Ainsi, surveiller le flux communicationnel du Cameroun est d’une importance stratégique pour les impérialistes— la France, soutenue par le FMI, et en sous-main par l’ONU. Ces expansionnistes savent que si les Camerounais tiennent encore face aux attaques extérieures, c’est parce qu’ils détiennent encore ce patrimoine stratégique pour leur sécurité.
Feumba Samen