Assassinat de Samuel Paty :
ce qu’a raconté dans sa plainte aux policiers l’adolescente mise en examen pour « dénonciation calomnieuse »
La jeune élève du collège du Bois d’Aulne, à Conflans-Sainte-Honorine, avait accusé l’enseignant d’avoir diffusé une image à caractère pornographique et de l’avoir exclue de son cours.
Eric Pelletier France Télévisions Publié le 26/11/2020
Ces quelques phrases couchées sur procès-verbal sont le point de départ d’un engrenage mortel. Elles valent aujourd’hui à une jeune collégienne d’être mise en examen pour « dénonciation calomnieuse », dans le cadre de l’enquête sur l’assassinat de Samuel Paty. Le 8 octobre, à 20h32, Z. vient déposer plainte au commissariat de Conflans-Sainte-Honorine (Yvelines). Agée de 13 ans, scolarisée au collège du Bois d’Aulne, elle vise son professeur d’histoire-géographie, pour des faits que la police qualifie de « diffusion d’image pornographique ».
Ce jour-là, Z. est accompagnée de son père, Brahim Chnina, l’homme qui a mis en ligne une vidéo traitant ce même professeur de « voyou ». Quelques jours plus tôt, l’enseignant a consacré un cours à la liberté d’expression, montrant une caricature du prophète Mahomet nu, publiée dans Charlie Hebdo.
« Les musulmans, vous pouvez sortir, car vous allez être choqués »
Une gardienne de la paix prend la déposition de l’adolescente. La retranscription de sa déclaration court sur deux pages, selon nos informations. Voici ce que raconte la jeune plaignante : « Celle-ci nous explique que, le lundi 5 octobre 2020, elle a été victime d’une diffusion d’une image pornographique de la part de son professeur d’histoire-géographie ». La jeune fille explique qu’elle était en cours dans sa classe de 4e au collège du Bois d’Aulne lorsqu’un incident a éclaté. « Alors que je me trouvais en cours d’histoire-géographie, cours tenu par M. Paty, l’islam a été évoqué, raconte-t-elle. M. Paty interroge l’intégralité des élèves concernant leur appartenance religieuse. Il a demandé aux élèves de lever la main. » L’adolescente affirme alors que l’enseignant aurait dit : « les musulmans, vous pouvez sortir, car vous allez être choqués » et qu’il aurait ensuite diffusé « sur le rétroprojecteur, une image, en disant : ‘ça c’est le prophète Mohamed’. Cette image projetée représente un homme entièrement nu. »
La jeune fille déclare alors s’être indignée, provoquant une réaction vive de son professeur : « Il m’a dit ‘du balai, tu perturbes trop mon cours’ en montrant la sortie avec le bras ». « Pour finir, je tiens à préciser que monsieur a demandé que je sois exclue du collège pour deux jours », conclut Z.
Samuel Paty dénonçait une « fausse déclaration dans le but de nuire »
On le sait aujourd’hui, cette déposition est une suite de mensonges et de contre-vérités. Le cours, qui a semble-t-il posé problème, a été donné le lendemain, mardi 6 octobre. Et, ce jour-là, Z. était absente. Enfin, elle n’a pas été exclue par Samuel Paty mais par la direction pour ses indisciplines et absences répétées depuis le début de l’année. Ces mensonges relayés par son père sur les réseaux sociaux, repris par un islamiste sulfureux, ont conduit à une cabale contre le professeur et contre le collège, ponctuée de menaces.
Le 12 octobre, Samuel Paty avait été entendu par les policiers dans le cadre de l’enquête pour cette prétendue diffusion d’image pornographique. L’enseignant avait alors déposé plainte à son tour contre la jeune fille et son père pour « diffamation publique ». « Il s’agit d’une fausse déclaration dans le but de nuire à l’image du professeur que je représente, du collège et de l’institution », estimait-il alors. Quatre jours après, il était assassiné en pleine rue par Abdoullakh Anzorov.