« Aucun désordre ne sera toléré en 2020 »
Il a pris la parole devant les sénateurs. Le chef de l’Etat Alassane Ouattara. Et c’est du feu qui en est sorti. Du feu comme pour embraser. Embraser serait-il une belle œuvre de ses convictions ? Je n’en sais rien. C’est une question d’exercice. S’exercer à comprendre les hommes et les événements. Que ceux qui le peuvent, interrogent son passé politique et militant.
« Aucun désordre ne sera toléré en 2020 ». Voilà l’expression du feu. Un feu dévorant. Mais que veut dire par là Alassane Ouattara, le Docteur en Économie, dont le Doctorat n’a prouvé à son peuple que son expertise en endettement massif déraisonnable ?
« Aucun désordre ne sera toléré en 2020 » Que veut-il dire par là ? Je n’en sais rien. Mais une idée me vient. Ouattara considère comme « désordre » tout ce qui contrarie sa pensée et son dessein. Quand il a une idée, personne ne doit s’opposer à sa mise en œuvre. Quand il a un plan, même rebelle et dommageable, personne n’a le droit de se dresser contre, même pour neutraliser ses piques contre votre propre intégrité physique. Se défendre pour sa survie en pareilles circonstances, serait un désordre intolérable. Toute contestation, toute protestation, même constitutionnelle serait un désordre.
Voyez les militaires des Forces de Défense et de sécurité sous Laurent Gbagbo, jusqu’aujourd’hui en prison. Certains ont fait plusieurs années de prison avant d’être mis en liberté. Or, ils ne faisaient que défendre la Mère Patrie attaquée par sa rébellion. Chose qu’il a trouvée intolérable. Inconcevable qu’on s’oppose à sa rébellion. De même, Laurent Gbagbo même, Président de la République, devait lui faire plaisir de se laisser « zigouiller » par les rebelles. Il ne l’a pas fait et s’est défendu. Ce serait un crime contre l’humanité. Il devient du coup un dictateur qui aurait sa place à la Cour pénale internationale.
Que veut-il dire donc par « Ces élections se tiendront et il n’y aura rien. Arrêtons de nous faire peur. Il n’y aura rien en 2020. Il n’y aura aucun désordre, parce qu’aucun désordre ne sera toléré » ? N’est-ce pas pour prévenir ou intimider l’opposition qui a des revendications sur son entêtement à prendre un troisième mandat et sur la réforme profonde de la Commission électorale indépendante et sur bien d’autres sujets d’intérêt national ? N’est-ce pas dans le sens de « 2020 est bouclé » ?
Mais en fait, que va-t-il faire en 2020 en cas de contestation ? Que sait-il faire de mieux si ce n’est mater, violenter les manifestations pacifiques ? Que promet-il en toile de fond quand il dit « Aucun désordre ne sera toléré en 2020 » ? N’est-ce pas la chienlit ?
Avec ce verbe martial, on comprend que la Cei n’est pas négociable pour Ouattara. D’ailleurs, il ne veut pas de réunions répétées sur la Cei. Une Cei non-consensuelle, profondément partisane, qu’il engage déjà à se mettre au travail pour tenir les délais constitutionnels des élections de 2020. Rien des propositions pertinentes d’indépendance et de transparence de l’opposition ne doit altérer les plans de passage en force du régime. Que l’alchimie de Gon Coulibaly restera la décoction à faire boire aux Ivoiriens pour leur donner un ballonnement et une colique des plus regrettables. L’opposition dit qu’il n’est pas question d’une simple recomposition de la Cei, mais surtout d’une réforme profonde. Mais le régime ne veut pas en entendre de cette oreille. Le chef de l’Etat ne peut donc dire ce qu’il a dit de façon fortuite. Il ne veut pas donner à l’opposition ce qu’elle attend de la Cei, mais ne veut pas qu’elle manifeste son désaccord, en déclarant que « Aucun désordre ne sera toléré en 2020 ».
Que réserve Alassane Ouattara aux Ivoiriens en 2020 ? Apparemment des choses pas amicales.
Germain Sehoué
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