A la Cour pénale d’Abidjan, la farce continue…

Maître, pouvez-vous revenir sur ce que la décision du juge ?

– En réalité, il était en train de dire qu’on va renvoyer l’audience à demain. Nous sommes en train de discuter à huis clos pour trouver des solutions au problème qui se pose à nous tous. On a un vrai problème dans ce dossier, c’est la comparution des acteurs des faits. On n’a pas encore trouvé le bon habillage juridique pour voir comment ils comparaîtront. Nous allons continuer à discuter demain (aujourd’hui, ndlr) et nous allons apprécier. Pour nous, c’est capital. Peu importe l’habillage juridique, peu importe ce que la loi a prévu et ce qu’elle n’a pas prévu, nous n’allons pas aller dans un procès où les acteurs des faits n’ont pas été entendus. Ça c’est clair. Et, pour nous, c’est fondamental. Nous n’allons pas continuer dans un procès où les acteurs des faits n’ont pas été entendus. Après, si on doit trouver des artifices juridiques pour voir comment ils comparaissent, nous sommes d’accord pour aller à la table des négociations. Comme on veut que le procès se termine, nous allons continuer à discuter pour trouver la solution. Mais toujours est-il que, peu importe ce qui va être trouvé comme solution, si les acteurs des faits ne viennent pas, nous n’allons pas continuer le procès.

Le juge Bouatchi Kouadio a dit que ces acteurs clés seront présents le 16 novembre prochain…

– Il l’a dit la fois dernière à l’audience, mais il ne nous a pas donné l’occasion de répondre à ce qu’il a dit. Nous lui avons dit aujourd’hui que nous ne nous reconnaissons pas dans son programme. Il est libre de faire son programme, c’est lui le président de la Cour, il peut faire son programme comme il veut, mais, nous, les avocats de la défense, nous ne nous reconnaissons pas dans son programme. Pour preuve, c’est parce que nous ne nous reconnaissons pas dans son programme qu’aucun de nos témoins n’est venu aujourd’hui.

Craignez-vous qu’une fois les autres témoins entendus, la Cour n’entende plus les acteurs clés ? Le procès pourrait ainsi prendre fin et la Cour, rendre son verdict sur la base de ce que les autres témoins auront dit…

– Si vous voulez, nos inquiétudes sont objectives. Je m’explique. A l’enquête préliminaire, on aurait dû entendre les acteurs des faits. A l’instruction qui a duré quatre (4) ans, on aurait dû les entendre. Pourquoi les acteurs des faits n’ont pas été entendus ? On dit que deux personnes se battent dans une maison et on accuse quelqu’un qui habite dans un autre pays. Commençons par entendre ces deux personnes qui se battent et, si elles n’ont pas été entendus, c’est qu’il y a un problème. Que cachait la justice pour ne pas entendre les acteurs des faits ? Aujourd’hui, on essaye de rattraper la situation. Il n’est point question qu’on nous dise « entendons vos témoins secondaires et les acteurs clés viendront ensuite ». Et s’ils ne viennent pas ? Je suis désolé. Mme Gbagbo a été condamné à vingt (20) ans de prison alors qu’il n’y avait aucun élément de preuve contre elle. Nous n’allons pas prendre le risque qu’elle se fasse condamner alors que tout le monde sait qu’elle est innocente. C’est clair et c’est net.

Revenons un peu sur l’article 326 évoqué par l’un de vos confrères… Pourquoi, selon vous, le juge ne veut pas faire usage de cet article pour faire venir les acteurs clés à la barre ?

– Le juge a ses raisons objectives. Vous avez le droit, chacun l’interprète autrement. Nous pouvons avoir raison comme il peut avoir raison. Mais moi je ne suis plus au stade des artifices du droit. Si on était au stade des artifices du droit, Mme Gbagbo n’aurait jamais dû être jugée devant cette Cour d’Assises. Pourquoi ? Parce que les infractions pour lesquelles on la poursuit nous nées après les faits. C’est d’un. De deux, l’année passée, on aurait dû juger Mme Gbagbo et la faire condamner parce que l’arrêt de renvoi de la Cour d’Assises fait toujours l’objet de suspension car on a fait un pouvoir en cassation que la Cour suprême n’a pas encore validé. Si on veut rester dans la loi, elle n’aurait jamais dû être jugée. Ils l’ont quand même condamnée. Et cet arrêt est nul, cette condamnation est nulle pour nous. Voilà la réalité. Tantôt on fait du droit quand ça les arrange. Et, quand ça nous arrange, on ne fait pas du Droit. Non. On fait du Droit pour tout le monde et de façon unanime. Si ce n’est pas le cas, qu’on s’asseye et qu’on discute.

Et qu’est-ce qui peut se passer demain (aujourd’hui, ndlr) ?

– On va venir pour discuter, c’est ce qui va se passer. Si non, aucun de nos témoins ne viendra.

Donc n’y aura-t-il pas d’audience publique alors ?

– Il y aura une audience. On va l’ouvrir, on va se retirer et discuter à huis clos et on va revenir la refermer. C’est tout. Il n’y aura pas autre chose.

Propos recueillis par Anel’G, 8 Novembre 2016

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ABIDJANACTU.COM L’ancienne Première Dame de Côte d’Ivoire, Simone Ehivet Gbagbo, et ses avocats ont brillé par leur absence, ce 10 novembre 2016, au palais de justice d’Abidjan-Plateau. La Cour, ayant constaté cette absente injustifiée de Mme Gbagbo, a pris une mesure plus ou moins sévère à son en encontre. En effet, sur proposition du parquet général et de la partie civile, le juge Bouatchi Kouadio va lui délivrer une sommation de comparaître via un huissier de justice, conformément à l’article 319 du Code de procédure pénale. Selon cette disposition, si Mme Gbagbo refuse de se présenter à la barre, le juge peut ordonner que les forces de l’ordre partent la chercher pour l’amener à la barre contre sa volonté. Elle n’a dorénavant donc plus le choix.

Anel’G, 10 Novembre 2016

abidjanactu.com

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10 novembre 2016  |  Alerte Info

La défense de l’ex-Première dame de Côte d’Ivoire, Simone Gbagbo, jugée pour « crimes contre l’humanité », « ne participera plus » à son procès, a déclaré mercredi à Abidjan son avocat principal, Maitre Ange Rodrigue Dadjé, après que la cour d’assises a annulé les citations à comparaître de quatre témoins attendus ce jour.

« La défense à partir d’aujourd’hui (mercredi) ne participera plus à ce procès. Il revient à la justice ivoirienne de rendre une décision pour condamner Mme Gbagbo », a dit Me Dadjé, ajoutant que la Cour d’assises « rentrera dans l’histoire selon la porte qu’elle aura choisie ».

Après avoir constaté l’absence de quatre témoins dont des responsables de la principale société de pompes funèbres en Côte d’Ivoire (Ivoire sépulture, IVOSEP) qui a « transporté les corps » des victimes de la crise postélectorale, la Cour a déclaré « nulles » leurs citations à comparaître et ordonné « qu’il soit passé outre leur audition ».

Le procureur général, Ali Yéo, a relevé que ces citations sont « irrégulières » car elles « datent du 08 novembre pour que les témoins comparaissent le 09 novembre » alors que « le délai le plus court » prévu par la loi « est de trois jours ouvrables ».

« Nous avons la preuve que la justice ivoirienne ne veut pas de ce procès (…). On ne peut pas demander une chose et son contraire », a réagi Me Ange Dadjé qui a expliqué face à la presse qu’ »au cours d’une réunion » mardi avec la Cour, il lui a été demandé de « convoquer » ces témoins pour mercredi, « sachant que le délai de trois jours n’est pas respecté », soulignant que sa demande de les faire comparaître « la semaine prochaine » a été rejetée.

Depuis le 02 novembre, date à laquelle la Cour a fixé un calendrier de passage des témoins de la défense, le déroulement du procès de Simone Gbagbo est ralenti. Les avocats de l’accusée ont récusé l’ordre de passage et disent être confrontés au refus de plusieurs témoins cités à comparaître, dont des experts et des personnalités politiques, qui ont réclamé « une convocation du parquet » avant d’être entendus.

« Je ne prendrai jamais l’initiative d’appeler un témoin de la défense » au risque d’être « imputé » du « délit de subornation de témoins », a dit M. Yéo, ajoutant qu’ils sont « libres de comparaître quand on les cite de manière régulière ».

L’avocat principal de l’accusée a considéré pour sa part qu’il « n’y a pas de subornation de témoin » dans ce cas de figure parce que la demande vient de la défense, rappelant que le seul témoin a avoir comparu, professeur Hélène Yapo Etté (médecin légiste) « était au bureau du procureur » la veille « pour avoir l’autorisation de venir témoigner ».

L’ex-Première dame de Côte d’Ivoire est jugée depuis le 31 mai pour « crimes de guerre » et « crimes contre l’humanité » commis pendant la crise postélectorale en Côte d’ivoire, ayant causé la mort d’au moins 3.000 personnes, selon le gouvernement.
Son époux, Laurent Gbagbo, détenu depuis 2011 à La Haye, est jugé pour les mêmes faits par la Cour pénale internationale (CPI).

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