Aujourd’hui à la CPI
Ainsi, après d’intempestifs et irréguliers «arrêts de jeu», dont le dernier date du 7 décembre, nous voici dans les dernières secondes de la fin de la première partie d’un match à sens unique, démarré le 28 janvier 2016.
En effet, depuis cette date du 28 janvier 2016, un blanc seing a été concédé à l’Accusation en vue de l’alignement de tous ses meilleurs ouvriers capables de démontrer la mise en place effective, d’une organisation criminelle, par le Président Laurent GBAGBO et le ministre Charles BLÉ Goudé. Une telle organisation criminelle ayant, est-il prétendu, pour mission d’exterminer les ressortissants du Nord de la Côte d’Ivoire ainsi que les partisans de Dramane OUATTARA, avec pour finalité la confiscation du pouvoir d’État.
Après donc le défilé de 78 témoins devant la Cour, avec pour vocation exclusive d’étayer le contenu du Document Des Charges(DNC), moult fois remodelé après le départ du premier Procureur de la Cpi, sieur Luis Moreno OCAMPO, au terme de presque deux ans assortis de gymnastique procédurale abjecte, c’est, médusé, que le monde entier attend ultimement, ce 17 janvier 2018, de découvrir ces preuves des crimes du Président Laurent GBAGBO, avec, probablement la comparution aujourd’hui de l’un des plus célèbres experts légistes dont est fière la Côte d’Ivoire : Professeur Hélène Yapo-ETTE.
Aussi sans préjudicier à la trame des conclusions auxquelles est parvenue dame ETTE, avouons-nous que depuis que ce bal est ouvert, nous sommes en droit de nous interroger sur le réel intérêt d’une telle mission, en raison de son caractère techniquement chimérique
En effet, lorsqu’il y a mort d’homme, pour que la responsabilité du suspect soit admise, il faut un lien de causalité entre le fait générateur et le dommage.
Qu’est-ce ?
Cela veut tout simplement dire, par exemple, que lorsque quelqu’un est victime, au même moment, de taillades au moyen d’une machette, et de blessures par coups de feu, et décède des suites de ses blessures, il faudra déterminer, avec précision, si la victime est décédée des suites des blessures des taillades à la machette ou des impacts de balles. Aussi pour lui permettre de se déterminer, faudra-t-il mettre à disposition à l’expert, aussi bien la machette que les caractéristiques de l’arme à feu litigieuse et des munitions utilisées.
Sur la base des caractéristiques des deux instruments du crime, l’expert déterminera précisément si le décès est consécutif à l’hémorragie provoquée par les blessures faites à l’arme blanche ou par l’explosion d’un organe vital du fait de l’impact de l’arme à feu.
Comme on le voit, l’exercice ne consiste pas donc pas dans le seul fait de déterminer la cause du décès. Bien plus, dans la recherche de la responsabilité pénale, il faudra aussi et surtout identifier, et l’auteur et la nature de l’instrument du crime.
Ainsi exposé, et revenant à la guerre post-électorale ivoirienne, par quelle alchimie, un expert légiste parviendra-t-il à déterminer que les corps des victimes à lui présentés sont distinctement l’œuvre d’instruments appartenant à «l’organisation criminelle» prétendument levée par le Président Laurent GBAGBO, et non de ceux appartenant aux hommes de Dramane OUATTARA ?
En effet, dans cette guerre asymétrique, où les hommes de Dramane OUATTARA, armés par la France et l’Onu, détenaient les mêmes ou des armes plus sophistiqués que celles des Forces de défense et de sécurité de Côte d’Ivoire, à supposer que le médecin légiste soit parvenu à la conclusion que le décès est la conséquence, par exemple, d’une arme blanche ou d’une arme à feu, comment parviendra l’homme de l’art à une conclusion inattaquable faisant la nette distinction entre cette arme blanche appartenant à l’organisation criminelle supposée du Président Laurent GBAGBO et celle appartenant aux rebelles et à leurs partenaires internationaux ? N’en sera-t-il pas de même pour les décès résultant des blessures par armes à feu ?
Pour parvenir à une telle conclusion non critiquable, cela ne supposera-t-il pas, comme indiqué plus haut, que l’expert ait d’abord analysé les caractéristiques du corps du délit, à savoir, l’instrument avec lequel le crime est présumé avoir été commis et les causes du décès.
Or, une telle mission revient à intégrer l’identification et la saisie préalables desdits instruments de perpétration des crimes, sur la scène de crime ?
En l’espèce, des armes ont-elles vraiment été saisies sur les FDS, notamment sur les lieux où ces corps auraient été trouvées ou est-il formellement établi que les armes qui ont causé ces décès ne sont exclusivement détenues que par les FDS ou la prétendue organisation criminelle du Président Laurent GBAGBO ?
De telles conclusions n’exigent-elles pas, par ailleurs, la définition préalable des caractéristiques de l’armement des FDS, d’une part, et celui des rebelles, de la Force Licorne et des Forces Onusiennes, d’autre part ?
L’expert légiste, Hélène YAPO-ETTE, a-t-il eu, à l’occasion de cette mission, connaissance du contenu exhaustif de l’arsenal des rebelles de Dramane OUATTARA, de celui de la Force Licorne et de l’Onuci, tous protagonistes sur le théâtre des combats, pour être en capacité de distinguer les dommages que les armes de chaque entité militaire pouvaient causer, au contraire de celui des défenseurs de la République en 2010-2011 ?
Avouons, qu’au regard de la vocation d’une expertise médicale dans un cas de décès, ces obstacles techniques ôtent tout intérêt aux expertises légistes réalisées jusque-là dans cette affaire.
Dès lors, quelle que soit l’amplitude de son art, c’est dans une mission quasi impossible que s’est engagé le Professeur Hélène ETTE. Car, en la matière, les vagues suppositions sont irrecevables.
Dans tous les cas, mon grand-père n’avait eu de cesse de me répéter que «si le soleil du matin n’a pu sécher le linge, ce n’est pas le crépuscule qui y parviendra».
Il en va donc que ces deux dernières minutes d’arrêt de jeu, qui vont s’ouvrir dans quelques deux petites heures, ne serviront absolument à rien, en tout cas pas au lien de causalité entre les corps examinés et les moyens avec lesquels la mort a été donnée.
Bon spectacle gratuit, à tous !
L’Activateur Tchedjougou OUTTARA
Roger Dakouri Diaz