L’incroyable violence de la macronie

par Elric Menescire mercredi 31 juillet 2019

Ou le récit d’un naufrage en bande organisée…

Une violence économique

L’excellent et inclassable Emmanuel Todd eut un jour cette phrase qui résonne désormais comme un coup de marteau : « Permettez-moi de vous démontrer pourquoi Macron, à l’inverse de Mussolini, n’est pas un fasciste. C’est parce que Mussolini avait un programme économique, lui ! »

Et, force est de constater que le « programme » économique de macron n’est en fait pas de lui… car il suit les Grandes Orientations de Politique Economique émises par l’Union Européenne à la lettre. Nous allons le démontrer de façon très simple et factuelle.

Ces GOPE sont émises par le Conseil de l’UE. Ce qui est marrant, si on va fouiner sur le site de cette institution qui affirme n’avoir qu’un « pouvoir de recommandation », c’est que son vrai pouvoir réside dans le fait que ces recommandations sont de nature juridique. Dit plus clairement : suite à l’adoption du Traité de Maastricht en 1994, chaque état membre n’a d’autre choix que de se mettre au diapason de ces préconisations. Car, s’il ne le fait pas, un mécanisme bien rôdé se mettra en place : amendes en pourcentage de son PIB, mise au pli par « les marchés », voire prise de contrôle par une Troïka, comme en Grèce où à Chypre…les exemples sont nombreux, et parfaitement documentés.

Pour éviter cela, la plupart des marionnettes ayant été élues via le suffrage « démocratique », à la tête des états européens, n’ont d’autres choix que d’appliquer à la lettre ces recommandations issues d’une entité extra territoriale, travaillant exclusivement au bien-être des flux financiers, des oligarques et des multinationales. Il en va de leur survie politique, mais aussi de celles de leur pays.

Comme le disait si bien Jean-Claude Drunker, « il ne peut y avoir de choix démocratique contre les traités européens ».

Deux exemples :

-Dans les GOPE 2017, on constatait les « recommandations » suivantes

« La commission recommande que la France s’attache, en 2017 et 2018 :

– à réaliser d’importantes économies à court terme en ralentissant les dépenses de Sécurité sociale » Fait – PLFSS 2017 : moins 2.7 Milliards en 2017. En 2018 : hausse de diverses taxes Tabacs, sodas, CSG +1.7%.Hausse du forfait journalier hospitalier de 18 à 20 euro. Sans parler des réductions sur les prestations : report de l’indexation des retraites et du minimum vieillesse, baisse des APL…

-Les systèmes de retraite étant déficitaires sur le court moyen terme, il faut un objectif ambitieux : limiter les dépenses de santé et obtenir des gains d’efficacité à moyen-long terme. En cours-Réformes des retraites de 2019 (voir plus bas)

-Prendre des mesures pour réduire le coût du travail et améliorer les marges bénéficiaires des entreprises (..). Fait (maintien et augmentation du CICE, Flat Tax)

-Les caractéristiques du système d’assurance-chômage (…) sont susceptibles de décourager le retour à l’emploi. Fait (réforme Pole Emploi, voir plus bas)

-« Un certain nombre de barrières à l’entrée et de règlementations, ainsi que des tarifs, brident l’activité économique des professions règlementées(…) » Fait (vote CETA, Exit Tax).

Nous remarquons ici même que ces recommandations ont été parfois suivies dans les temps, parfois pas immédiatement… Ceci s’expliquant par le fait que la France, second pays de la zone euro, peut quand même aller pleurer de temps en temps à Bruxelles et Berlin, et réclamer un peu plus de temps pour mettre en œuvre les mesures d’austérité voulues par l’UE des banques et de la finance, vu ses « spécificités budgétaires ». Et peut-être aussi un peu à cause de son passif révolutionnaire ? Jusqu’ici, Merkel, Schauble et les vrais maitres de l’UE ont constamment acquiescé, par la voix de leurs séides (au hasard, Pierre Moscovici, Pascal Lamy et autres Jacques Delors), et autorisé quelques déviations de calendrier, voire quelques écarts budgétaires, tant que ceux-ci n’étaient pas de nature à remettre en cause l’ensemble de l’édifice.

Avançons un peu dans le temps…

GOPE 2019, nouvelles recommandations :

« La commission recommande que la France s’attache, en 2019 et 2020 :

réduire les dépenses et à réaliser des gains d’efficacité dans tous les sous-secteurs des administrations publiques, notamment en précisant pleinement les mesures concrètes nécessaires dans le contexte du programme « Action publique 2022 » et en surveillant étroitement la mise en œuvre de ces mesures. Fait – Plan « CAP 2022 » acté.

Prenons le temps de développer un exemple, car il est éloquent :

« CAP 2022 » dans la branche Assurance maladie, c’est comme objectif à l’horizon 2022 : -3,5% de budget et 8000 suppressions d’emploi (soit 10% des effectifs), plus un passage au digital massif de tous les secteurs. C’est aussi la fusion et la régionalisation des CPAM, mais surtout la fermeture d’agences et d’accueils du public en masse, au profit du seul compte Améli et des bornes multi services, sur le même modèle que la Poste devenue Banque Postale.

Pour info, le « Comité Action Publique 2022 » a été créé sous l’autorité d’Edouard Philippe dès 2017. Ce Comité, composé uniquement d’économistes, de chefs d’entreprises et de hauts fonctionnaires, a commencé à dresser une feuille de route pour la « modernisation et une gestion moderne, en véritable rupture avec la gestion traditionnelle des Services Publics ». Oh le beau mot macroniste. Ce qu’il avait juste oublié de préciser dans son joli communiqué plein de beaux mots tous neufs, et que le syndicat Solidaires Finances Publiques a fait inopportunément fait fuiter sur son site internet, c’est que l’objectif principal de ce comité était « la réduction drastiques des dépenses publiques et des budgets des Services Publics ». Chiffres à l’appui, dans la partie du document qui devait rester cachée aux yeux du public. C’est beau, la démocratie.

Ainsi furent sacrifiés sur le sacro saint autel de l’austérité budgétaire l’Hôpital Public (fermeture de plus de dix maternités de proximité en deux ans, sans parler des Urgences… ce qui a conduit à des drames qui auraient pu, et auraient dû être évités, et qui ont été couverts avec les larmes de crocodile adéquates, par l’ex lobbyiste des labos pharmaceutiques devenue ministre de la Santé Agnès Buzyn), mais aussi l’Education nationale (400 fermetures d’écoles rurales à l’été 2019, contrairement aux promesses du menteur en chef installé à l’Elysée) ou encore les URSSAF, CAF, CPAM qui ont vu leurs effectifs fondre comme neige au soleil, et se sont vues fusionner et regroupées sur les grandes agglomérations, éloignant d’autant plus de très nombreux usagers de leurs services, usagers n’ayant d’autre choix que de tout faire par internet, et tant pis pour ceux qui n’y arrivent pas…à ce sujet, selon la dernière étude INSEE sur la question, environ 13 millions de Français ne sont pas à l’aise, voire complètement largués, avec le numérique. Ce chiffre dantesque représente les oubliés de la république, qui marche à pas forcés vers une numérisation et une digitalisation de ses Services Publics, vues comme une formidable source d’économies par des énarques en totale déconnexion avec la réalité de nombreux français : personnes âgées, n’ayant pas les moyens de s’acheter un ordinateur ou un smartphone, ne comprenant rien à l’informatique, résidant en zones blanches ou grises (sans haut débit), illettrés, en difficulté chronique…12 millions de personnes.

Soit pratiquement un cinquième de la population de ce pays ( !), sciemment abandonnée par les gouvernements « de droite et de gauche droite » successifs, politiques déconnectés et carriéristes n’ayant qu’une seule préoccupation en tête : se servir, plutôt que de servir.

La crise des gilets jaunes, passés et à venir, et sans doute à chercher de ce côté…

Reprenons le fil de nos GOPE 2019-2020 :

-également, à réformer le système de retraites pour uniformiser progressivement les règles des différents régimes (…) Fait – plan présenté en 2019. En cours de « négociation ».

Ce plan ne va bien sûr aucunement dans un sens favorable aux salariés et futurs retraités. Le fait de passer d’un système par répartition, équitable même si largement perfectible, à un système à points, la valeur desdits points étant soumise au bon vouloir annuel du gouvernement, est clairement une forfaiture. De plus, l’accentuation du système de décotes, ne donnera d’autre choix aux retraités que de devenir pauvres, ou de continuer à travailler jusqu’à un âge bien plus avancé que le fameux « âge légal ». Le but étant bien sûr, in fine, de se débarrasser massivement de ceux qui pourraient prétendre à une retraite bien méritée. De les obliger à travailler le plus longtemps possible. En effet l’espérance de vie en bonne santé, selon l’INSEE, se réduit drastiquement à partir de 67 ans. C’est pourquoi un système qui incite les gens à travailler jusqu’à cet âge (comme en Allemagne, et bientôt en France, si cette loi est votée), est de fait un système inique, qui dépossède une grande majorité d’un droit à retraite acquis de longue date, après une vie de labeur. Et l’argument qui consiste à marteler que les caisses sont vides est nul et non avenu : ne serait-ce que par l’évasion fiscale institutionnalisée et non punie, évaluée entre 80 et 120 milliards d’euros selon les économistes. Malgré ses beaux discours, la macronie n’a rien fait pour y remédier, et récupérer cet argent qui serait bien mieux investi dans les retraites, ou l’Hôpital Public, que dans les poches d‘un Bernard Arnault qui étouffe de pognon et ne sait plus qu’en faire. Au contraire : la prolongation du verrou de Bercy en 2018 –mesure consistant à écarter toute poursuite pénale en cas de fraude fiscale d’une grosse fortune, particulier comme entreprise, comme le prévoit normalement la loi- le prouve. Ce gouvernement ne prête qu’aux riches…

-à favoriser l’intégration de tous les demandeurs d’emploi sur le marché du travail (…) Fait – Et, comme d’habitude, on ne va taper uniquement que sur les plus faibles, les cinq millions de chômeurs accusés de ne pas vouloir travailler, dans un pays où seulement 300 000 offres d’emploi sont disponibles. Traduire : ils vont faire comme en GB ou en Allemagne, et tant pis si nous avons des légions de travailleurs pauvres et de précaires, du moment que les statistiques sont bonnes ! Le dernier lien étant particulièrement savoureux, venant d’un journal quasi bolchévique, j’ai nommé « Alternatives Economiques », qui avoue quand même franchement que ces réformes n’ont fait qu’aggraver la situation. Le pire donc, c’est qu’ils le savent, et le font sciemment !

-à poursuivre la simplification du système d’imposition notamment (…) en continuant de supprimer les impôts inefficaces et en réduisant les impôts sur la production(…) et à mettre pleinement en œuvre les mesures visant à stimuler la croissance des entreprises. » Fait – mise en place du Prélèvement à la source et suppression de l’ISF. Maintien de la Flat tax, exit tax, verrou de Bercy prolongé en 2019…

Conclusion ? Ces développements en appellent deux :

-Comment un gouvernement mettant si consciencieusement en œuvre de telles politiques, dont l’origine est à chercher du côté de Bruxelles et de Berlin, peut-il encore se targuer d’être souverain ?

-Comment une telle politique pourrait-elle récolter l’assentiment de la majorité des Français, quand cette politique tape précisément, unilatéralement et constamment, sur cette même majorité, et jamais sur la minorité ultra favorisée par ces politiques ?

Ce qui nous amène logiquement au prochain point :

La violence policière

On le sait, les chiffres sont connus. Mais permettons-nous, encore une fois, de les rappeler ici –et de les mettre en perspective. Comme nous allons le voir, la violence ne constitue, de fait, plus que le seul socle de la macronie. Sa seule politique envisageable, sa seule souveraineté. Dit autrement la macronie n’est plus qu’une coquille vide, condamnée à appliquer des mesures décidées unilatéralement hors de son contrôle, mais avec un pouvoir de nuisance assez élevé, car elle n’a plus d’autre pouvoir que le pouvoir de la « violence légitime ». Elle ne peut faire qu’une seule chose, et elle a démontré qu’elle le faisait bien : taper sur les gens, de façon de plus en plus visible et complètement disproportionnée. Quitte à dépasser le supportable.

L’ONU ne s’y est pas trompée, tout comme les ONG Amnesty International et autres ACAT, qui ont demandé officiellement à la France de se calmer, quelque part entre deux recommandations identiques sur le Vénézuela ou la Centrafrique !

En effet avec le mouvement des gilets jaunes, on a atteint un bilan que n’auraient pas renié un Pinochet ou un Xi Jinping : pas moins de 11 000 arrestations en 7 mois, pour la plupart arbitraires (sur simple assertion de la BAC ou des « forces de l’ordre » dans la majorité des cas, sans aucune autre preuve matérielle), et plus de 2000 condamnations de personnes sans aucun casier judiciaire, auparavant inconnues de la justice, en comparution immédiate avec mandat de dépôt à l’issue d’une audience expéditive. Le Syndicat des Avocats de France décrit la procédure de comparution immédiate comme « un déni de justice », ne donnant pas aux mis en cause la possibilité de se défendre, le plaçant devant une alternative impossible : soit la refuser pour préparer sa défense, et du coup accepter de passer plusieurs mois en détention préventive, sans aucune garantie. Soit l’accepter, et ne pas pouvoir se défendre efficacement, avec un avocat le plus souvent commis d’office, quelques heures voire quelques minutes avant le procès, sans aucune connaissance ni préparation du dossier ! Ajoutez à cela que ce « choix » doit être effectué après 24 heures de garde à vue dans des conditions sordides (cellules insalubres, entassés à plus de 15 dans 20m2, lumière allumée, sans possibilité de dormir ni d’aller aux toilettes…), dont la personne ressort fortement éprouvée, déboussolée et terrorisée…Le choix est vite fait !

Benalla, Cahuzac, Guéant & co doivent bien en rire, là où ils sont. C’est-à-dire, toujours pas en prison, contrairement aux milliers de gilets jaunes innocents à l’heure où j’écris ces lignes. Pas sûr que ces derniers en soient rendus à de meilleurs sentiments quand ils en ressortiront… Ils sont d’authentiques prisonniers politiques, emprisonnés sans réelle possibilité de se défendre face à une police et une justice en roue libre, et en mode tout-puissant.

Mais il y a pire : plus de 4000 blessés, dont 300 graves (blessures à la tête, fractures, défigurations, comas…), dont 26 éborgnés grâce au fameux « Lanceur de Balles de Défense (de la bourgeoisie) », classé comme arme de guerre en catégorie A2 par les instances internationales (CIP). A tel point que son fabricant, l’armurier Suisse Brüger&Thomet, a dû demander une dérogation pour pouvoir passer le marché avec l’Etat Français. Pour l’anecdote, voici ce que disait l’inventeur du Flashball, Jean Verney-Carron, à propos du LBD40 qui l’a depuis remplacé : « la balle est d’un calibre 40mm…C’est beaucoup plus dangereux que les FlashBall. C’est un calibre de guerre ». Notons que cette arme n’est utilisée en Europe, que par un seul gouvernement : celui du « pays des Droits de l’Homme » et de son souriant méprisant de la République, Emmanuel Macron.

Idem pour les lanceurs de grenades et leurs munitions, ainsi que les fameuses GLI-F4, OF F1 et autres grenades de « désencerclement » utilisées de façon offensive et complètement hors de contrôle sur les derniers mois. Plus de 19 000 tirs de LBD à ce jour, plus de 6000 tirs de grenades, soit plus que les quatre dernières années en 6 mois ! Ces dernières sont classées en catégorie A2, ce qui en fait des « armes de guerre de catégorie intermédiaire », par le ministère. Alors, quand le fabricant répond à une question du Conseil de Sécurité de l’ONU ( !) sur cette anomalie, qui veut que des armes classées comme matériel de guerre soient utilisées contre des manifestants, il répond de la sorte : « nous avons vendu 6000 de ces lanceurs pour la police et la gendarmerie française dans le but de la gestion démocratique des foules (sic) en accord avec le ministère de l’intérieur et de la défense, classant le lanceur comme un produit à létalité réduite (re-sic). Nous n’avons pu les exporter qu’en accord avec ledit ministère  », on ne peut que constater la chose : le gouvernement macronien a sciemment acquis des armes de guerre, qu’il comptait utiliser contre le peuple (je ne peux me résoudre à dire « son » peuple), dans le but de gérer démocratiquement la contestation que ne manquerait pas d’attiser sa politique proriches, antisociale, et complètement injuste vis-à-vis des classes moyennes et peu aisées.

Résultat ? 5 mains arrachées…ayant reçu pour la plupart des GLI F4 en tir en cloche, ce qui est « formellement interdit » mais parfaitement toléré et impuni par le ministère de Castaner depuis plusieurs mois. Mais aussi deux morts, c’est avéré depuis quelque temps, quoi qu’en disent des journalistes complètement discrédités et des médias possédés à 95% par 9 oligarques : Zineb Redouane, dont la contre autopsie par les autorités algériennes a révélé qu’elle avait été victime d’au moins deux tirs (un au visage, et un sur la poitrine), et que ces deux tirs, complètement injustifiés vis-à-vis d’une dame de 70 ans qui fermait ses volets et n’avait rien fait, ont « directement provoqué la mort ». Et de Steve Maya Caniço, jeune fêtard de 24 ans dont le corps a été retrouvé 38 jours après sa disparition sur un quai de Nantes, suite à une charge de la police le soir de la fête de la musique. Charge dont les potentiels effets étaient fort bien connus par celui qui l’a décidée, vu qu’il était également aux commandes en 2017, et qu’un rapport lui était parvenu sur « la dangerosité » d’une telle tactique, ce qui l’avait conduit à renoncer à celle-ci à l’époque. Mais pas en 2019 : en 2019, on charge, gaze et lâche des chiens sur des ados éméchés(ou pas), à quelques mètres d’un quai non protégé, où coule un fleuve profond aux courants puissants. Résultat : 14 personnes à l’eau, suite à une chute de plus de 7 mètres à 4 heures du matin…et un dont le cadavre ne remontera que 38 jours plus tard, le temps que l’eau fasse son œuvre…. Saurons-nous jamais toute la vérité, même si beaucoup, à cette heure, la pressentent ? Un premier élément de réponse, avec la conférence de presse répugnante du 1er ministre et de son séide de l’intérieur, dédouanant totalement les responsables de cette charge meurtrière. Ainsi que, bien sûr et comme par hasard, le rapport de l’IGPN qui va dans le même sens.

Dans ce pays, les violences policières sont non seulement légion, mais « la doctrine » a totalement évolué, pour le pire du pire : désormais, les policiers, CRS et autres miliciens des BAC ont droit à la plus stricte impunité. Les « fautes professionnelles » n’existent plus pour cette catégorie de population. Sur près de 300 plaintes à l’IGPN, la « police des polices », dont les membres sont exclusivement de la maison, et nommés par le ministère…aucune enquête n’a abouti à quelque condamnation de policier que ce soit à ce jour, même dans les cas les plus flagrants (le commandant du groupe de CRS ayant tiré sur Zineb ayant refusé de collaborer, et n’ayant reçu aucune sanction, en est l’illustration la plus évidente). Pourquoi en serait-il autrement ? De Belloubet la ministre de la « justice », qui ordonne par écrit au Parquet( !), en flagrante violation des règles les plus élémentaires de séparation des pouvoirs, d’être « particulièrement sévère et rapide dans toute affaire impliquant des gilets jaunes », à Macron et Castaner, qui affirment « qu’on ne peut pas parler de violences policières dans un état de droit », en passant par un procureur zélé qui couvre des policiers ultraviolents ayant envoyé dans le coma une femme de 73 ans, et qui a quelque temps après un subit accès de conscience…c’est toute la macronie qui montre son vrai visage. Celui du sourire, des costards trois pièces-dents blanches, de la bienveillance de façade et du dialogue social par devant, mais de la plus grande férocité et de l’injustice caractérisée dans le réel. Benalla, comme Dettinger, chacun à leur manière en attestent : en France, en 2019, selon que vous soyez puissant ou misérable, les jugements de cour vous rendront tout blanc ou tout noir. Depuis le XVIIe siècle, où Jean de la Fontaine prenait l’apparence d’animaux pour se permettre de critiquer le Roy sans risquer la lettre de cachet ou les galères, rien n’a vraiment changé.

 Et puis, entre police et pouvoir, c’est toujours le même échange de bons procédés : ceux qui aident la macronie à survivre –et il s’agit uniquement des « forces de l’ordre », rien d’autre- sont récompensés en retour : pas de poursuites, jamais. Et parfois même une petite prime de Noël, à l’occasion. Le fait que le 44ème suicide de policier ait eu lieu la semaine dernière (soit huit de plus, dès juillet, que pour toute l’année 2018) ne fera aucunement sourciller Castaner, qui préfère aller se trémousser en boîte et refuser en bloc le paiement de leurs millions d’heures supplémentaires d’un revers de mains (« je ne leur dois rien »), alors que sans cette milice fidèle qui a flanché mais tenu bon, sont sort eut été scellé depuis bien longtemps…Où est le problème, au Pays des Droits de l’Homme ?

Dernière anecdote, qui fait plutôt froid dans le dos, celle-là : sur le site de Bastamag, est disponible le récent bon de commande en matériels et munitions du Ministère de l’Intérieur pour les quatre prochaines années. Ainsi qu’un article édifiant sur ce que cela veut dire.

On y apprend avec effarement que la commande s’élève à 10 000 grenades de désencerclement par an (soit 40 000 pour les 4 ans), pour une valeur de 1,84 millions d’euros. Mais également, sur la même durée de marché, 25 millions de cartouches pour fusils d’assaut, pour une valeur de 11 millions d’euros. Nous parlons bien ici de munitions non pas destinées à l’armée, mais aux « forces de l’ordre », qui sont dotées des fameux fusils d’assaut HKG36, et ce depuis les attentats de 2015.

Sur 9469 fusils de ce type en circulation, cela fait 22 chargeurs par fusil, chaque année, durant quatre ans. Nous parlons ici de calibre de guerre, chaque balle étant potentiellement létale jusqu’à deux kilomètres. Le Canard Enchaîné avait révélé qu’un télégramme du 10/01/2019 avait demandé aux CRS de déployer deux fusils de ce type lors des manifestations des gilets jaunes…au motif qu’il y avait « un risque de vol si on les laissait dans les camions ».

Alors, pourquoi une telle commande, surtout en période de disette, les caisses étant soi-disant vides pour les Services Publics, les Hôpitaux, l’éducation et j’en passe, d’après vous ? Le ministère de l’intérieur, questionné à ce sujet (comme sur bien d’autres choses), n’a toujours pas répondu. Osons une hypothèse : sans doute est-ce en prévision d’une future gestion moins « démocratique » des « foules en furie » ?

Violence sociale et symbolique

Ceci nous amène à un autre point : l’incroyable violence symbolique de la macronie.

On le sait, en politique le symbole est ce qui permet de gouverner avant même que les mots ne soient prononcés. Qui veut faire passer une politique, une action, des mesures, se doit d’être à tout le moins exemplaire, au risque, au mieux, de ne pas être pris au sérieux, ou au pire, de susciter l’opposition, puis la haine la plus farouche. Il faut savoir manier le symbole pour avoir une chance de faire passer ses messages.

Or dans ce domaine, il faut dire que la macronie a cumulé ce que certains appelleraient des « faux-pas », mais qu’ils ont en plus eu l’outrecuidance de l’assumer totalement. De ne pas voir où cela poserait problème. De fait, la macronie est une déconnexion : déconnexion du réel de la majorité des français, déconnexion des fins de mois qui surviennent le 10, déconnexion de la misère sociale, économique et culturelle dans laquelle sont plongés une très grande partie des Français.

La quasi-totalité du gouvernement actuel a des casseroles au derrière. Et la quasi-totalité d’entre eux se permet de faire la leçon aux Français en permanence. Sans y voir aucun problème, et braillant à qui mieux-mieux que « la démocratie est en danger » quand on ose leur mettre le museau dans leurs contradictions.

D’une Marlène Schiappa qui écrit un livre infantilisant, bourré de conseils à destination des futures mamans, où on apprend « comment frauder le congé maternité de sécurité sociale », et qui se permet ensuite de faire la leçon féministe constamment à tout le monde, en passant par Muriel Pénicaud, ancien DRH de Danone ayant effectué des licenciements boursiers lui ayant permis de gagner plus d’1,13 million d’euros sur ses stock-options, et nommée ministre du Travail et de l’Emploi dans la foulée, pour atterrir à François de Rugy, grand allergique aux crustacés et aux fruits de mer, ayant construit toute sa carrière de carriériste sur une image fantasmée de transparence, de probité, d’honnêteté dans la Fonction Publique…jusqu’à faire la leçon aux Députés sur leurs dépenses, du temps où il était au perchoir…scrutant à la loupe leurs dépenses…la macronie est un naufrage.

Non seulement elle est un naufrage moral, un exemple même du « faites ce que je dis mais surtout pas ce que je fais », mais surtout et avant tout un abîme symbolique, dont on se demande si elle n’est vraiment, authentiquement imbécile, inexpérimentée, imbue d’elle-même, voire si ce n’est tout cela à la fois ? A moins qu’elle ne le fasse exprès ?

Oh certes, nous avions déjà eu notre lot, avec un Hollande se faisant élire grâce à « mon ennemi c’est la finance » avant de courir ventre à terre à la City pour s’excuser, ou un Cahuzac affirmant « les yeux dans les yeux » que jamais de sa vie il n’avait possédé le moindre compte en Suisse, voire avec un Sarkozy renvoyant l’ascenseur en faisant bombarder et tuer son bienfaiteur Libyen, après l’avoir complaisamment invité à planter ses tentes sur les Champs-Elysées… Mais il faut bien reconnaître, qu’au bout de deux ans d’exercice du pouvoir seulement (put*in, deux ans, deux ans !), la violence sociale de sa politique trouve un écho particulièrement symbolique dans le comportement de chacune des composantes de la macronie : violence de l’appareil d’état, judiciaire, médiatique…toutes au service d’une politique toute tracée.

Violence sociale ? Inutile de répéter à l’envi toutes les mesures destinées à maintenir la tête sous l’eau des plus précaires, à taper vite et fort, sans leur laisser le temps de réagir. Diminution des prestations, disparition des Services Publics, taxes injustes, etc. Nous en avons déjà parlé. Mais ce qui gêne, fondamentalement, c’est le fameux en même temps qui, avec un aplomb fantastique, assène et assume que ça n’est jamais assez. Un gouffre sans fond, une voracité sans limites.

Diminuer les APL des plus précaires de 5 euros ? C’est bien, mais c’est encore mieux si en même temps on supprime l’ISF des plus riches. Protéger Benalla ? C’est bien, mais c’est encore mieux si en même temps on fait immédiatement lourdement condamner Dettinger. Blesser, mutiler et emprisonner des milliers de contestataires ? C’est bien, mais c’est encore mieux si en même temps on décore leurs bourreaux. Et si, en même temps on hurle sur tous les toits que saccager quelques permanences d’élus félons ayant voté sans sourciller le CETA, c’est « menacer la démocratie », et que « cela rappelle les heures les plus sombres de notre histoire », alors l’honneur est sauf. Pantomime.

Le en même temps trouve ici sa justification stratégique : la simultanéité de l’attaque, et l’aplomb ahurissant de ce qui arrive derrière, est destiné à sidérer l’opposition, à la court-circuiter, à l’empêcher de rassembler ses forces en ouvrant simultanément plusieurs fronts. Nous serions sensés passer en mode défensif, reptilien, tétanisés comme un lapin pris dans les phares.

Cela peut fonctionner, un temps.

Un temps seulement, car, de l’aveu même du petit prodige que la finance a donné à la France, « les causes de la colère ne sont pas derrière nous ». C’est méconnaître profondément l’âme de ce pays, que de penser que les gens sont rentrés dans le rang. Qu’ils sont prêts à subir sans combattre, à mourir sans se battre. La France n’est pas une favela, son esprit révolutionnaire est toujours intact… le seul pays à avoir décapité son roi, à avoir connu cinq révolutions et/ou épisodes majeurs qui ont fait trembler les plus puissants et arrogants qui se crurent tout permis, et ce de tous temps, c’est bien la France. 1789, 1848, 1871, 1936, 1968 : il y avait bien, bien trop longtemps que la fin de l’Histoire promise par le triomphe du néo libéralisme, suite à la chute du mur de Berlin en 89, n’avait connu de contrepoint. Oser croire l’inverse, l’asséner sur toutes les radios, l’ânonner en boucle sur toutes les chaines de télévision, c’est se planter lamentablement. Les pseudo-intellectuels, répétant à l’envi le même catéchisme sur tous les canaux possibles, ne pourront changer la réalité. Les faits sont têtus. Les Français n’étaient pas dépolitisés, ils étaient juste en sommeil. Et le réveil a sonné.

Les médias, journalistes et autres séides de La République En Miettes viennent de l’apprendre à leurs dépens. Gageons que ça ne sera pas la seule déculottée qu’ils connaitront sur les prochains mois.

C’est bien d’une décrépitude symbolique, morale et au final, intellectuelle que nous venons de parler. Celle de tout ce que ce pays appelle « élites ».

Ce qui nous amène à la dernière partie.

La violence intellectuelle

Fin du bal. Les masques tombent.

On nous avait vendu un prodige, un disruptif, un surhomme qui ne dormait que très peu, perpétuellement dans l’action, et dont la pensée complexe n’était pas faite pour les gens du commun que nous sommes. Un président d’une startup nation nommée France.

Celui-ci n’a cessé de nous asséner une violence totale : politique, économique, symbolique, morale.

Il a aussi et surtout fait preuve d’une incroyable imbécilité : croire qu’il pouvait cracher à longueur de temps son mépris à la figure de tous ceux qui ne pensent pas comme lui, ne vivent pas comme lui, ne respirent pas comme lui, n’aiment pas comme lui, ne s’habillent pas comme lui, ne sont pas comme lui. Et s’en tirer indemne.

A chaque nouvelle maladresse (qui finalement, n’en était pas une), il a rechuté, tel un Sarkozy qui jurait la main sur le cœur que « ça y est, j’ai compris, j’ai réfléchi, aujourd’hui j’ai changé ».

Ceux qui ont tout et ceux qui ne sont rien, le kwassa-kwassa qui amène surtout du Comorien, les illettrés, les fainéants, les cyniques, les alcooliques, les fouteurs de bordel, ceux qui ne peuvent pas se payer un costard et qui n’ont qu’à aller travailler, ceux qui ne travaillent pas et qui n’ont qu’à traverser la rue, les jojo gilets jaunes et autres plongés dans le coma parce qu’ils manquent de sagesse n’ont qu’à bien se tenir. Il « ne cèdera rien ». D’ailleurs, si les gens sont toujours en colère, c’est parce qu’il ne va pas assez vite, assez loin, assez fort : il le comprend, il faut accélérer, les gens sont impatients. Promis, il va leur en donner plus !

En fait la question est simple : comment un tel imposteur a-t-il pu finir président ?

Sans doute, et en premier lieu, grâce à l’extrême collusion médiatico-politique de la macronie. Comme nous l’avons précisé plus haut, Macron a avant tout été élu grâce à un soutien sans faille d’une poignée d’oligarques, qui possèdent à 95% les grands médias TV, radio et journaux, de ce pays. Et le fait est que les journalistes ne sont même plus aux ordres : ils sont tous élevés dans le même moule, pensent, sous un artificiel clivage droite/gauche, les mêmes choses, sont attachés aux mêmes privilèges et au final, constituent un des deux piliers, avec la police, qui permet à l’édifice macronien branlant de continuer à tenir. Point d’inventaire à la Prévert ici, il suffit de lire ou relire les différents « papiers » et autres éditos dégoulinants de chiendegarderie, d’écouter les invectives soigneusement orchestrées des divers éditocrates et autres économistes ayant le même siège réservé depuis des années, pour s’apercevoir que les journalistes ne sont pas censurés par leurs patrons milliardaires… non, car ILS SONT la censure. Et gare à celui ou celle qui sortirait du rang : il connaitrait le sort peu enviable des tricards du journalisme, ceux qui se font dégager sans autre forme de procès, de Schneidermann à Lancelin, en passant par des figures moins connues, la sanction est souvent expéditive et sans appel.

D’un Castaner débitant soigneusement sa fake new de l’attaque de la Pitié Salpétrière, et repris en chœur par tous les chiens de garde sans aucune vérification (ni mea culpa, une fois la supercherie dévoilée), en passant par les multiples mensonges concernant les présumés « leaders » des gilets jaunes (ce qui démontre qu’ils n’ont vraiment, vraiment rien compris à ce mouvement), des invectives et autres appels au meurtre d’un philosophe de caniveau comme Luc Ferry, demandant à ce que les policiers « utilisent leurs armes, à la fin ! », repris partout, et condamnés nulle part, par aucun d’entre eux…les éditocrates et autres vendus à la macronie ont gagné leur ticket de bienvenue au bal des faux-culs et des vendus, Premier Prix avec les félicitations du jury !

Le fait même qu’on nous ait présenté Macron comme un prodige, tout le long de la campagne de 2017, alors qu’il était un parfait inconnu deux ans plus tôt…et qu’on continue à le faire un peu partout…alors qu’il suffit de l’écouter, pour se rendre compte que ce n’est qu’un guignol né avec une cuillère en argent dans la bouche…ce fait même suffit à prouver de façon irréfutable qu’il y a décidément quelque chose d’au moins aussi pourri qu’un corps flottant dans la Loire depuis 38 jours , dans le royaume de France… Macron, un génie ? Alors qu’il suffit de regarder son cursus, pour se rendre compte qu’il est quelconque, voire médiocre –nous parlons de quelqu’un qui a raté deux fois le concours de l’Ecole Normale Supérieure, et a passé trois ans à buller en classe de prépa littéraire ! Alors qu’il suffit de regarder un de ses discours en manches de chemise, ou un de ses meetings électoraux ridicules, avec des figurants à l’arrière-plan, pour se rendre compte de la vacuité empreinte de fatuité du personnage. Parce que c’est son prooooojeeet !

Quitte à paraître pédant (et en même temps, je vais l’assumer totalement), nous avons ici un vrai exemple de violence intellectuelle. La violence faite à un pays tout entier, et aux vrais intellectuels, passés et présents, qui firent de ce pays un des précurseurs du monde. C’est-à-dire ceux qui sont, et furent aptes à penser le monde différemment. A le décrire, à le décrypter, à l’interpréter, pour proposer des solutions, des voies, des visions nouvelles.

C’est une insulte à la patrie d’Hugo, de Zola, de Montesquieu, de Rousseau, de Diderot et des Lumières. A ceux qui s’engagèrent, jusqu’à en risquer leur vie, contre l’injustice. C’est une insulte aux précurseurs furieusement novateurs et modernes que furent Derrida, Foucault, Sartre, Camus, Aron, Bourdieu et tant d’autres… Jusqu’à Paul Ricœur, dont l’imposteur à la tête du pays se réclame, et qui, bien que sa philosophie ne soit pas exempte de reproches, a quand même mis la question de l’Ethique au centre de ses préoccupations et de son œuvre. On aurait envie de crier, de hurler à la face du président des ultrariches : et toi, Macron, l’as-tu fait ? L’AS-TU FAIT ?

Macron incarne cette violence de l’injustice, qui fait qu’un gamin bien né, avec l’esprit suffisamment retors pour trahir ses amis (voir l’affaire avec Adrien de Tricornot), et suffisamment manipulateur pour arriver à se faire les bonnes relations (Xavier Niel, Mimi Marchand, ainsi que quelques centaines de donateurs anonymes invités à Las Vegas grâce aux Fonds Publics du ministère de l’économie), arrivera à se déguiser en agneau et le jour venu, dupera l’ensemble du troupeau avec la complicité des bergers…et tentera de se faire passer pour ce qu’il n’est pas.

Jusqu’au jour où tomberont les masques.

Trois ans, c’est long.

Furieusement long.
agoravox.fr

petite photo en supplément, trouvée sur la toile. Le Président, ou le vassal d’un autre…