Qui sont les Guérés et Wobé

Les Wés (ou Wee ou Wegnons) sont un peuple africain vivant dans l’ouest de la Côte d’Ivoire. Ce peuple y est installé depuis près de sept siècles déjà, bien que jadis, sa population s’étendait plus au nord, vers les régions montagnardes ivoiriennes, libériennes et guinéennes. On les retrouve également à l’ouest du fleuve Cavally, au Libéria. Nommés également Wegnons, qui signifie en langue We, « l’homme qui pardonne », ou « l’homme au cœur noble », selon les traductions.
La distinction entre les Guérés et les Wobé
La tradition orale, du Nord au Sud et de l’Est à l’Ouest, ne fait état que d’un seul terme pour désigner l’ensemble des groupements actuellement appelés guéré et wobé. Ce terme est Wè, ou Wèon ou encore Wènion, et signifie « les hommes qui pardonnent facilement « . Ni le terme Guéré, ni le terme Wobé n’existaient dans la société traditionnelle, mais furent créés par l’administration militaire, au moment de la conquête, sur la base d’un malentendu à la fois géographique et linguistique, dans les conditions suivantes :
Le terme Guéré : la pénétration du futur pays « guéré  » s’est faite par le Nord, à partir du poste de Logoualé. Parvenu sur les bords du Kô, qui marque la limite orientale du pays dan, l’officier commandant la colonne de pacification s’enquit du nom des populations habitant « de l’autre côté de la rivière ». Il lui fut répondu qu’il s’agissait des « Guémin », littéralement « les hommes de Gué », groupement que les Dan connaissaient bien pour lui avoir souvent fait la guerre, mais qui n’était en réalité que l’antenne la plus septentrionale de la confédération guerrière Zagna. Cette appellation fut officiellement retenue en 1911 par 1’Administrateur du Cercle du Haut-Cavally, le capitaine Laurent, qui, pour désigner l’ensemble des populations au sud des Dan, « leur a appliqué la dénomination Guéré ou Gué en usage chez leurs voisins du Nord « . La désinence « ré » de Guéré semble être une déformation du terme Dan mE, homme. Gué-mË, les hommes de Gué ;
Le terme Wobé : Les circonstances exactes (la colonne militaire venait-elle de Séguéla ou de Man) et la date d’apparition du terme Wobé sont inconnues. Mais le processus décrit est identique au précédent. A la question de savoir par quel terme étaient désignées les populations dont on allait entreprendre la conquête, il fut répondu qu’il s’agissait des Wè, et l’interprète, qui était Dioula, s’exprima par les termes « Wé-bé ». « Là-bas ? Ce sont les Wé  » . La transcription donna Wobé. (D’après A. SCHWARTZ)

Les populations guéré et wobé ne constituent donc qu’une seule et même ethnie, l’ethnie Wè. Il faut noter cependant qu’avant la période coloniale, il n’existait aucune forme d’organisation regroupant l’ensemble des Wès, et « l’identité ethnique » Wè était beaucoup moins importante que l’appartenance à une lignée ou à un clan (=canton, groupe de villages alliés). La « frontière culturelle » avec les peuples voisins était, donc, assez diffuse. Ainsi, certains groupements wobés septentrionaux ont incontestablement une origine et une culture mixte dan-wé ou toura-wé tandis que plusieurs petits « peuples » (niaboua, niédéboua…) ont une culture intermédiaire entre celle des clans wés et bétés voisins.

La notion d’appartenance ethnique a pris de l’importance lorsque la colonisation a mis en contact les Wès avec des populations appartenant à des univers culturels différents (musulmans dioulas, akans, burkinabés…), d’autant plus que la fonction politique, militaire et religieuse du clan a été totalement abolie. Ceci explique probablement la « réussite » des termes guéré et wobé qui ont finalement supplanté le terme wè chez les populations elles-mêmes. Ce dernier, redécouvert par les ethnologues, a été adopté par les intellectuels mais n’est pas encore d’un usage courant. En réalité, les wès utilisent souvent le terme guéré pour désigner l’ensemble des wés (guérés, wobés, khrans) et les petites ethnies apparentés (oubi, niaboua…). Cette création/substitution du nom de l’ethnie n’est pas particulière aux wés. Les termes « bétés » et « yacoubas » serait, par exemple, des créations coloniales tandis que celui de « dioula », synonyme de commerçant musulman, ne concernait à l’origine que les quelques milliers d’habitants de la région de Kong qui n’avaient pas étés exterminés ou vendus comme esclaves par les sofas de Samory Touré.

L’image contient peut-être : une personne ou plus et personnes debout

Histoire
La grande forêt, refuge des Krou avant la colonisation
La tradition orale et les témoignages des premiers navigateurs européens ayant abordé les côtes du Liberia et de la Côte d’ivoire montrent les populations Krou, dont fait partie le peuple Wé, sont implantées depuis au moins le XVème siècle sur les territoires où elles sont encore aujourd’hui. Elles occupaient jadis un espace qui s’étendaient à la fois plus au nord et plus à l’est, au delà du Bandama. Les invasions Mandingue (= dioula) au nord et Akan à l’est ont, en effet, contraint ces peuples à abandonner la zone des savanes et à limiter leur habitat à la grande forêt primaire du Liberia et de la Côte d’ivoire(voir la carte « La mise en place des populations Krou XVIe-XIXe siècle », d’après A. Schwartz 1993).

Le pays Wé est ainsi resté relativement à l’écart des influences extérieures jusqu’au seuil du XX ème siècle du fait, en premier lieu, des formidables barrières naturelles que constituaient la forêt tropicale et les montagnes du pays Dan (=Yacouba).
Mais les causes de cet isolement étaient aussi économiques car, hormis la noix de cola, qui alimentait un commerce actif entre le nord du pays Wé et la région de Séguela, la grande forêt avait peu de biens précieux à offrir aux marchés cosmopolites du Sahel ou aux trafiquants européens de la Côte. L’or d’Ity n’avait pas encore été découvert et la région ne participait pas au trafic des esclaves.
Ajoutons que les populations forestières Wé comme leurs voisins Dan, Krou et Bété étaient connues pour leur farouche esprit d’indépendance autant que pour leur férocité au combat, ce qui a probablement dissuadé bien des marchands et des envahisseurs de s’aventurer dans ces régions. Le nom de « Côte des Malegents » (= Côte des mauvaises gens) avait même été donné à la moitié Ouest de la façade maritime de la Cote d’Ivoire tandis que la partie Est, plus accueillante aux trafiquants et aux missionnaires était qualifiée de « Côte des Bonnegens ».
Sources:
http://www.wobebli.net/histoire/histoire.htm
https://fr.m.wikipedia.org/wiki/Wés