Liberté pour Hubert Oulaye, mais pas Assoa Adou. Pourquoi?

DECLARATION DE MICHEL GBAGBO RELATIVE A LA MISE EN LIBERTÉ PROVISOIRE DU MINISTRE HUBERT OULAYE

Michel Gbagbo, chargé du dossier des prisonniers politiques au FPI (Sangaré)…

Nous avons appris ce Mercredi 7 juin 2017, à la surprise générale, la mise en liberté provisoire à compter du jeudi 8 juin 2017 du professeur Hubert Oulaye, ancien Ministre de la Fonction publique et Président du Comité de Contrôle du Front Populaire Ivoirien (FPI) de Laurent Gbagbo.

Le procès du Ministre Hubert Oulaye qui était attendu depuis le début de l’année 2017, n’a laissé courir aucun bruit sur son entame effective. Ce lourd silence a plutôt entrainé la focalisation des esprits sur l’état de santé d’un autre détenu politique en la personne du Ministre Assoa Adou, nouveau pensionnaire de la MACA après un long séjour au Camp Pénal de Bouaké. L’état de santé du ministre Assoa Adou s’est avéré de plus en plus dégradé alors que son procès était annoncé pour le 19 de ce mois de Juin 2017. Un mystère continue également d’être entretenu sur les raisons ayant motivé l’incarcération subite du Ministre Assoa Adou. De sorte que lors d’une de ses visites officielles dans l’Indénié en 2015, le Chef de l’Etat s’était senti obligé de déclarer à ses parents de la région qu’il n’était informé ni de l’arrestation, ni même de la détention préventive prolongée de ce compagnon de longue route du Président Laurent Gbagbo.

Pour ce qui est de la décision de mise en liberté provisoire du Ministre Hubert Oulaye dont nous nous réjouissons et que nous saluons, celle-ci marque la fin de plus de deux ans de détention préventive. Mais la Côte d’Ivoire compte encore à ce jour plus de 210 prisonniers politiques en détention officielle répartis dans 13 prisons. Et les motifs réels de cette arrestation nous paraissent d’ailleurs aussi anachroniques que ceux de cette libération (provisoire).

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Assoua Adou

Le Ministre Hubert Oulaye, comme le Ministre Assoa Adou, avait été arrêté pour atteinte à la sûreté de l’Etat, juste après la tenue d’un Congrès interdit du FPI du Président Laurent Gbagbo. Cette arrestation s’était déroulée de manière extrêmement brutale, occasionnant l’hospitalisation de sa petite fille présente ce jour-là. Cette accusation a été servie à l’ancien Ministre par les autorités en place, comme à tant d’autres opposants. Et elle a occasionné la confiscation des libertés d’un citoyen qui, durant plus de quarante ans, aura servi son Pays avec dévouement et loyauté.

Le Gouvernement autocratique de Monsieur Ouattara a loupé là, encore une fois, l’opportunité d’œuvrer à la réconciliation nationale et de faire prévaloir l’intérêt général. L’arrestation et l’incarcération du Ministre Hubert Oulaye, originaire de l’Ouest du Pays, fait suite au retour de ce dernier dans son Pays pour œuvrer à la paix.

Le Gouvernement, en situation d’échec économique, fracturé par de graves dissensions internes, délégitimé par la corruption d’une caste de profiteurs, et aujourd’hui menacé par des mutineries à répétition et par la grogne sociale, semble à la recherche de boucs-émissaires : les tentatives d’humiliation d’opposants semblent devenir sa dernière arme. Mais il est déjà trop tard.

Trop tard parce que le régime d’Abidjan, en semblant être le défenseur de l’idéologie de la co-responsabilité et du concept de rattrapage ethnique, en trainant le boulet de milliers d’exilés et de centaines de prisonniers politiques, en ne rendant pas public le rapport de la CDVR, en ne situant pas la communauté nationale sur l’avancée du programme de réforme du secteur de la sécurité, en ne planchant pas véritablement sur la question sensible du foncier rural et des démobilisés et en ne réussissant pas à faire baisser le taux de pauvreté estimé à 50 % de la population, montre lui-même par ses actes qu’il a échoué à ramener la confiance, la paix durable, la cohésion et la réconciliation nationale dans le cœur meurtri des Ivoiriens.

Trop tard ensuite car malgré ces deux années d’embastillement, le peuple ivoirien et l’ensemble de ceux qui portent le FPI du Président Laurent Gbagbo dans leur cœur, et dont nous avons la prétention de dire qu’ils représentent la majorité de nos concitoyens, n’attendent plus que d’être démocratiquement libérés de l’arbitraire et de l’injustice que subissent tous les Ivoiriens.

Merci au Gouvernement pour cette libération mais il est encore une fois trop tard : le temps de payer la facture approche… Après plus de dix années de troubles politico-militaires et sept ans d’autocratie, le vers est dans le fruit. Les Ivoiriens rêvent maintenant ouvertement d’une autre Côte d’Ivoire. La guerre des citoyens contre les citoyens doit prendre fin. Le système de gouvernance doit garantir la justice sociale, le respect des libertés civiques et de la propriété privée. Il doit permettre l’égalité dans l’accès à la santé, l’éducation, la justice et l’emploi. Il doit consolider la paix dans les cœurs. Les Ivoiriens souhaitent sortir du chômage, et non aller en prison quand ils élèvent la voix pendant que leurs ressources sont pillées. Et seule leur mobilisation continue permettra de sauver la Côte d’Ivoire, notre Pays, et de lui (re) donner son véritable visage.

Abidjan, le 11 juin 2017
Michel Gbagbo,
mis en ligne par Oweil Kafalo