Eric Kahe : « Le RDR ou l’art de retourner à son avantage les souffrances infligées aux autres »

Nouvel art du cynisme politique ?

Dans son adresse à la nation sur l’état de la nation, le chef de l’État ivoirien Alassane Ouattara, a présenté la Côte d’Ivoire sous un angle des plus flatteurs, satisfecit d’une belle santé par son bilan à la tête du pays.

Tout en avouant n’avoir jamais imaginé qu’il arriverait au pouvoir dans les conditions qui furent celles de 2011, il ne précise pas à quel prix lesdites conditions lui permirent de se hisser à la tête de l’Etat : celui des milliers de cadavres amoncelés à l’ombre des chars français de Nicolas Sarkozy !

L’année de référence et donc de comparaison qu’il utilise pour illustrer les promesses par lui considérées comme tenues, est bien sûr l’année 2011. Alignant des chiffres soit gonflés, soit invérifiables, soit simplement faux, il essaie de rentrer dans l’Histoire en retournant à son avantage les épreuves et la misère imposées aux Ivoiriens par les méthodes des partisans qui l’ont porté au pouvoir.

Mais quel chef d’État bénéficiaire d’un si généreux PPTE, aurait pu réussir à faire moins bien ?
Quel est la réalité du rapport développement/endettement d’un mandat qui a fait exploser la dette de 6.000 milliards à 12.000 milliards FCFA dont 8.000 milliards au titre de la dette extérieure malgré les importants effets du PPTE ?
Pourtant, à seulement 6.000 milliards de dette, il disait en 2010, que le pays vivait au-dessus de ses moyens, se posant en avocat des générations futures.

Ainsi, quand il parle de retour de la sécurité, il oublie que cette dernière a été mise à mal par le coup d’État de 1999 et la rébellion de 2002, après des décennies de stabilité politique. Or, celui qui a officiellement et publiquement revendiqué cette rébellion avoue désormais que « M. Alassane Ouattara en a été le principal bénéficiaire », confirmant du reste les propos du comzone Koné Zakaria tenus de longue date et selon lesquels « les rebelles n’avaient pas pris les armes pour Soro Guillaume mais pour Alassane Ouattara ».

Dérégler pour revenir au statut quo ante ?

Quand il parle des performances économiques, il part de l’état du pays en 2011, en omettant soigneusement d’indiquer que de 2002 à 2011, c’est son « jeune homme » Guillaume Soro et ses comzones – aujourd’hui à la tête d’une armée à coloration essentiellement tribale –, qui ont mis en coupe réglée la moitié du pays, entraînant dans la misère la majorité des Ivoiriens, en même temps qu’ils se faisaient grassement octroyer de gros budgets et d’importants postes politiques et administratifs sur les recettes de l’autre moitié « épargnée ».

Quand il parle de 5 universités, il passe sous silence les détournements de ses ministres, qui ont badigeonné des façades de bâtiments à 100 milliards de nos francs, soit 150 millions d’euros. Sur les universités citées, 4 existaient déjà et étaient fonctionnelles (Cocody, Abobo, Bouaké, Daloa).

Quand  il annonce 115 km d’autoroute, il n’a pas l’élégance de noter qu’il a juste inauguré un travail de son prédécesseur.

Sur les chiffres annoncés, qui ira vérifier les 23.000 milliards de revenus des paysans issus des cultures vivrières et comment expliquer que ceux-ci (paysans) soient devenus plus pauvres ?

Pour le chef de l’État ivoirien, la CMU est effective du fait de l’enrôlement de 3 millions d’Ivoiriens. Comme si être enrôlé garantissait des soins de santé ! Dans sa volonté de présenter un « bilan inattaquable », expression chère à ses partisans, il cite l’hôpital Mère Enfant de Bingerville, dans le compte public. Il devient urgent de préciser le statut de cet établissement sanitaire.

Quel Ivoirien ou observateur sérieux de la vie dans ce pays peut accorder un quelconque crédit au mythe de l’école gratuite et obligatoire, avec distribution de kits jusqu’à la fin du primaire ? Pourquoi alors les mutuelles de développement ont-elles désormais pour activité essentielle de lever des fonds pour que puissent être réellement offerts ces fameux kits scolaires dans les villages ? À moins que cette prétendue distribution ne corresponde qu’à des lignes budgétaires détournées par le clan et que l’on voudrait couvrir !

Lorsque le président du RHDP parle de l’indemnisation des victimes, de la réconciliation effective et du retour des exilés, en les présentant comme autant des sujets de satisfaction, il nous offre la preuve que dans ce pays, beaucoup vivent dans une bulle.

Décision juste constitutionnelle

Sa décision de ne pas se présenter à l’élection d’octobre 2020, aussi salutaire soit-elle – en raison de la menace que sa potentielle candidature faisait peser sur le pays –, c’est la fin de partie du bouchon qu’il aura poussé, dix années durant, de plus en plus loin, sans oser franchir aujourd’hui la ligne de « trop ». Et cela, n’en doutons pas, sous la pression de ses « parrains »: sa nouvelle candidature n’allait plus dans le sens de leurs intérêts.

Au change, les Démocrates ivoiriens devront aller chercher leur victoire dans la sueur car les différents courants externes auront à cœur de le remercier d’avoir entendu leurs conseils.

Pour une fois que le RDR respecte la loi, ne boudons pas notre plaisir républicain, tout en gardant à l’esprit que ce renoncement à une candidature non autorisée par la Constitution se réduit à la tentative de tirer un profit politique de la non-perpétration de l’escroquerie juridique à laquelle le poussaient ses partisans… En somme, l’art du cynisme politique, l’art de créer des problèmes pour s’en proclamer la solution❗

Cap sur des horizons meilleurs

Après la parenthèse RDR avec son lot de haine, de cynisme politique et de mal à notre pays, Cap sur la nouvelle Côte d’Ivoire, républicaine, égalitaire, unie et démocratique.

Le ministre Eric Kahe
Président de l’AIRD
aird-ci.com