Bientôt la sortie d’Egypte

Un certain Barézy le Chanceux affirme sur les réseaux sociaux que la libération de Laurent Gbagbo «  est l’œuvre du président de la république Alassane OUATTARA qui avait promis qu’après les élections présidentielles, il allait mettre tout en œuvre pour que Laurent Gbagbo rentre en Côte d’Ivoire. La libération de Gbagbo est un non événement après 10 ans passés en prison hors du pays. (…) cette libération n’a aucunement rien changé dans le quotidien des ivoiriens ».
Dont acte, d’ailleurs le silence des médias ivoiriens le confirme : c’est un non évènement. Et pourtant, si la libération était un fruit du lobbying de Ouattara, tout le pays le saurait, les journaux télévisés ne se seraient pas lassés de le dire, de louer ce merveilleux Président qui tend la main avant même qu’on la sollicite!

En revanche j’ai été surprise par le discours de dame Ouattara qui en bonne dame patronnesse donne son obole aux institutions chrétiennes en cette veille de Pâques. Etait-ce mon imagination? Pour une fois j’y ai vu un peu plus de ferveur. Son « Notre Pays vit des moments difficiles certes, mais pour nous croyants, il est essentiel de garder la foi », lié à la situation sanitaire, sonnait plus juste que les années précédentes. Je ne sais pourquoi, je me suis dit « on dirait que dame Ouattara pour la première fois est confrontée au D.ieu créateur et juge.

« Il est essentiel de garder la foi »dit-elle encore, une foi aujourd’hui difficile pour celle qui jusqu’à présent n’a vu que les avantages liés à sa fonction de Première Dame, sans mesurer les implications pratiques et très concrètes d’un engagement au service du peuple ivoirien. Officiellement elle s’était mis en retrait de la gestion de ses affaires, les confiant à sa fille, pour se consacrer uniquement au bien des ivoiriens et ivoiriennes. Moins officiellement, ses compétences dans l’immobilier ont considérablement gonflé son portefeuille d’actifs; avec le roi du Maroc à ses cotés, les affaires ont prospéré…

Mais ces dernières journées ont été difficiles. Le spectre du retour de Laurent Gbagbo privé de 10 années de vie, sur la base d’une immense supercherie et de beaucoup de morts lui font dire « il est essentiel de garder la foi »; comme si ces paroles, de banales auparavant, n’allaient plu de soi cette année. Et son « Que le Seigneur veille sur notre Pays » parait plus sincère que le sempiternel et intemporel « Dieu bénisse la Côte d’Ivoire »

En mars 2020, un journal titrait :Alassane Ouattara Homme politique africain de la décennie. » C’était peut-être encore vrai il y a un an, grâce aux médias et instituts de sondage « favorables »; ici 200 journalistes africains soutenaient cette thèse, fruit non d’une conviction, mais d’un probable pot de vin. Maintenant, en cette veille de Pâques, il y a eu redistribution des cartes. D’ailleurs les communicants de Mr Ouattara sont silencieux depuis plusieurs jours, et la constitution du nouveau gouvernement sous la houlette de Patrick Achi prend du temps. De plus rien n’a filtré entre les probables échanges entre Nicolas Sarkozy et son poulain, le brillant économiste qui a tellement brillé que le pays s’est enflammé : flambée de violence, flambée des prix, flambée du chômage…

Le vent en cette veille de Pâques a brusquement changé de direction, la mer s’ouvre pour laisser le passage à Laurent Gbagbo et Charles Blé Goudé, mais comment va-t-elle se comporter face à l’oppresseur? Une chose est sure, Pharaon et sa cavalerie seront engloutis dans les oubliettes de l’Histoire. Le miracle économique de la CIV sous l’ère Ouattara n’a eu lieu que que dans le cercle restreint de la famille. Le pays n’ayant que ses yeux pour pleurer les morts, les emprisonnés, les disparus avant l’heure, dénoncer les injustices au quotidien, la violence, l’indifférence.

Celle qui dit en cette veille de Pâques,« Que le Seigneur veille sur notre Pays », combien de fois s’est-elle enquise du sort des ivoiriens en exil, de leurs enfants, des prisonniers politiques qui officiellement n’existent pas, mais croupissent encore en prison, tandis que beaucoup sont morts, laissant une veuve et des orphelins démunis…

2011/2021, dix ans qui auront vite passé pour les Ouattara, mais 10 ans ôtés à Laurent Gbagbo, volés, arrachés, par la calomnie, le mensonge, la haine gratuite, ça ne s’expie pas d’un revers de manche, d’une page tournée. Fatou Bensouda, procureure de la CPI jusqu’au 15 juin prochain, est elle-même emportée par le scandale. Même en étant aux ordres des états qui financent la CPI, elle aurait pu produire des témoins meilleurs acteurs de leurs mensonges que ceux qui se sont succédé à La Haye, sans compter ceux qui ont profité du voyage sans aller témoigner…

1O ans c’est long, la responsabilité de Nicolas Sarkozy et de son apprenti/économiste est immense. Rien ne nous dit que nous allons rentrer maintenant dans 10 ans consacrés à juger l’autre camp. La France est trop désireuse de masquer son horrible ingérence et ses mensonges. Le procès actuel en France des 9 soldats français tués lors des évènements de Bouaké 2004, le rôle de l’ambassadeur barbouze Jean-Marc Simon qui s’est reconverti à sa retraite en homme d’affaire franco-ivoirien, son rôle dans le lâche assassinat du colonel Gohourou Babri Hilaire, tué de dos, probablement depuis le toit de l’ambassade de France. Les quelques phrases sans équivoques de Nicolas Sarkozy, citées par la journaliste Fanny Pigeaud « Quand je vois le soin que j’ai mis à intervenir en Côte d’Ivoire… On a sorti Laurent Gbagbo, on a installé Alassane Ouattara, sans aucune polémique, sans rien ». des évènement que bien des gens voudraient balayer sous le tapis de l’Histoire.

Avril 2021, les 10 ans du Reich de la république bananière du réseau Ouattara se terminent lamentablement. Il faut espérer que les Ouattara sauront avec grâce ne pas se cramponner à un pouvoir qui leur échappe, pour lequel ils ne se sont pas du tout investi, sauf pour le dépouiller, vivre dans la Com et faire croire au monde occidental que tout va dans le meilleur des mondes. Pâque célèbre aussi la résurrection. Pour le moment tous les Ivoiriens morts, victimes de tueries, de maladie, de misère, d’injustice ne vont pas se lever pour combattre les criminels au pouvoir. Mais je suis sure qu’ils sont bien vivants pendant les nuits pour venir rendre visite aux dignitaires en col blanc qui ont engagé la ruine et la désolation.


Pessah, la Pâque juive, commémore a sortie d’Egypte, la sortie de l’esclavage, la révélation aussi d’un Dieu qui s’engage face à son peuple pour le libérer à bras étendu et le conduire vers la liberté, l’obéissance à sa loi, une loi de vie, de respect de l’autre. C’est ce que nous avons vécu pendant une semaine, juste avant Pâques. Je souhaite de tout mon coeur que les Ivoiriens, comme les hébreux héritent du statut de fils du Très-haut et quittent leur mentalité d’esclaves, relèvent la tête, se réconcilient, mais n’aient pas peur de reconnaitre leurs torts. Une réconciliation ne se fait pas sur le dos des victimes, transformant en un clin d’œil les bourreaux en enfants de choeur. Il faut que la justice retrouve son rôle et que les criminels soient poursuivis. La vie humaine est trop précieuse pour être bafouée, méprisée.
Alors oui, « que le Seigneur veille sur notre pays » Qu’il prépare le retour du Président Gbagbo, de tous les exilés. Que ce retour soit le commencement de la résurrection de l’Eburnie des ethnies réconciliées, où chacun retrouvera de vraies valeurs, sans corruption, sans mépris de l’autre pour rebâtir un pays solidaire et fraternel, respectueux de l’autre.

Shlomit Abel, dimanche de Pâques, 4 avril 2021