Alain Estrade est responsable de la branche d’arbitrage agroalimentaire à la direction des engagements d’Euler Hermes. Nous l’avons interrogé sur les grandes tendances du secteur agroalimentaire aujourd’hui.

Quelles sont les grandes tendances du secteur agroalimentaire ?

J’en vois trois principales même si chaque filière constitue un cas particulier.

  1. Le marché français est stable. La natalité y est en baisse pour la première fois en 10 ans : l’indicateur conjoncturel de fécondité s’établit à moins de 2 enfants par femme (1,93). Ce ne sont donc pas les besoins de la population qui vont tirer le marché.
  2. Mais la demande évolue. Généralement, on souhaite manger plus sainement, ce qui signifie : moins de viande, plus de bio. Ces deux tendances valent aussi pour l’Union Européenne, avec des disparités.
  3. La distribution alimentaire a continué à se concentrer. L’essentiel de ce qu’il y a dans nos assiettes est désormais vendu en GMS. Un industriel n’a aujourd’hui que cinq ou six acheteurs en face de lui, une tendance ancienne qui s’est encore renforcée en 2015. Cette situation présente des avantages… et des désagréments quant aux prix et aux marges toujours difficiles à maintenir.

Dans ces conditions, il est évidemment nécessaire de trouver des débouchés étrangers.

Comment se comporte le marché à l’export ?

L’export ouvre de belles perspectives à l’agroalimentaire français. Car si la consommation est stable dans notre pays, la population mondiale, elle, est en expansion. Le niveau de vie moyen tend à s’améliorer, la demande s’oriente vers des produits plus élaborés tout en recherchant une sécurité sanitaire renforcée. Ça serait dommage de ne pas en profiter ! D’autant que je constate une demande en hausse des produits français à l’étranger, par exemple en Allemagne. Aujourd’hui les débouchés principaux de nos exportateurs, hors vins et spiritueux, sont d’abord européens. Mais nous sommes très bons aussi en Afrique, en Asie, aux USA et en Amérique latine.

Le fait est que longtemps les industriels français de l’agroalimentaire ont misé sur la gastronomie nationale, défendant mordicus le goût français plutôt que de s’adapter au goût des autres. Les entreprises qui réussissent sont souvent celles qui font cet effort. Reste à aller sur place, comprendre les différences, et sélectionner ses nouveaux clients.

Quid de la santé financière des entreprises du secteur ?

En matière de solvabilité, l’agroalimentaire reste un secteur moins sinistré que d’autres, avec des différences notables selon les filières et la position dans la supply chain. Les plus défaillants se situent aux deux extrêmes de la chaîne d’approvisionnement : les agriculteurs et les petits détaillants (restauration, boulangeries…). Mais une crise sanitaire ou de confiance peut provoquer ou accélérer des faillites, comme nous l’avons vu avec l’affaire de la présence de la viande de cheval dans des produits préparés à base de bœuf.

Les filières trouvent assez facilement des financements, notamment quand elles sont au contact de la grande distribution et bénéficient de délais de paiement courts. Mais chaque année, des détaillants franchisés ou affiliés déposent le bilan, même s’ils arboraient une grande enseigne.

Quelles entreprises réussiront en 2017 ?

A mon avis, l’entreprise du secteur qui va réussir présente les caractéristiques suivantes :

  • une notoriété forte ou au moins moyenne
  • active sur les marchés d’exportation – pour s’émanciper de la concentration des débouchés français et de l’atonie de la demande
  • elle produit à l’étranger au goût local en plus de sa gamme de produits français
  • elle propose des produits à forte valeur ajoutée (ex : produits de niche, ingrédients qui entrent dans la fabrication d’aliments, nutrition et santé animale…)

En quoi un assureur-crédit peut contribuer à la réussite d’une entreprise agroalimentaire ?

Nous pouvons, nous devons, les accompagner à l’international. Faire pour eux le tri entre les bons et les mauvais payeurs, pour que leurs commerciaux ne perdent pas leur temps. Les faire profiter des informations remontées de nos implantations dans 56 pays. Assurer les recouvrements à la mode locale. Les dédommager des impayés, vite et bien. Leur proposer une option sécurité litiges. Et aussi, offrir la réactivité et la souplesse nécessaire à toutes les situations.

De la bourriche d’huîtres au cargo de grain, les filières agroalimentaires présentent une grande diversité. C’est la raison pour laquelle, chez Euler Hermes, nous avons des arbitres spécialisés par branche. Ils connaissent les saisons, le rythme des marchés, et les besoins particuliers.