Le XX ème siècle est mort, vive le XXI ème !
Le XXe siècle est mort, vive le XXIe !
Avec l’élection de D. Trump à la présidence des Etats Unis, une vague allant de la simple panique à la plus totale terreur s’est emparée de l’Europe. Il faut dire que le Président américain a dit tout haut ce que beaucoup n’osaient prononcer: l’Union européenne est un projet atlantiste aujourd’hui entre les mains de l’Allemagne, sa protection par l’OTAN coûte cher – trop cher. C’est la fin de l’ordre d’après-guerre qui s’annonce, mais dans un vide politique et intellectuel presque total.
Le ministre des affaires étrangères allemand, Frank-Walter Steinmeier, l’a parfaitement exprimé:
« Avec l’élection de Donald Trump, le monde du XXe siècle est définitivement dépassé »
Ce monde était basé sur une protection par les Etats Unis de l’Europe qui, elle, n’avait pas besoin de penser à financer et construire une véritable politique autonome de défense. Cette perte d’autonomie était compensée par une plus grande sécurité intérieure – sans armée, ont ne fait pas de guerre. Sans intérêts nationaux stratégiques, pas de politiques étrangères, donc pas de risque de conflit à l’intérieur de l’Europe. Protégée par les Etats Unis, l’Europe s’est transformée en Union européenne, a permis d’affaiblir les Etats – responsables de tous les maux – et avec eux les concepts clés comme « frontières », « intérêts nationaux » etc.
Pour aider à déconstruire l’Europe, l’idéologie néolibérale a été appelée à la rescousse et fut particulièrement efficace. Toutes les « barrières étatiques » – entendons bien, l’Etat est une barrière – doivent être levées pour permettre la circulation des biens, personnes et capitaux: déclarée, semble-t-il, but ultime de l’humanité. L’on réduit l’armée, l’on rejette la monnaie. Les Etats s’affaiblissent. Mais l’Allemagne tire son épingle du jeu, il faut dire que si les pays européens sont des Etats Nations, la nation allemande a été détruite avec la Seconde Guerre Mondiale, elle ne présente donc pas de risque dans un monde unipolaire globalisé. Et comme l’affirme Donald Trump:
Quand vous jetez un coup d’œil à l’Europe, vous voyez en réalité l’Allemagne, estime Donald Trump. [L’UE] est en réalité un instrument au service de l’Allemagne.
Et si l’on jette un oeil, sans a priori, l’on peut difficilement voir autre chose. La Chancelière allemande discute avec la Turquie pour « transférer » la crise des migrants après avoir déclaré que les portes étaient grandes ouvertes. L’Allemagne décide, les autres grands pays de l’Europe de l’Ouest discutent des décisions de l’Allemagne. Il reste les pays de l’Est pour soutenir l’atlantisme européen, même si la crise de l’immigration les fait toussoter. Et il est difficile de qualifier de succès la gestion par l’Allemagne de la politique migratoire européenne.
En ce qui concerne l’OTAN, en grande partie financée par les Etats Unis après la Seconde Guerre mondiale pour faire face à l’Union soviétique et à la guerre froide, en quoi est-elle adaptée pour faire face à la véritable menace aujourd’hui: le terrorisme. Certes, la Russie est poussée à bout de bras et de souffle médiatique engagé pour entrer dans les habits trop larges de l’URSS, mais elle porte très mal ce costume. Et la question du poids financier et de l’intérêt pour le contribuable américain de financer la sécurité européenne n’est pas apparue avec Trump.
Bref, Trump a mis les pieds dans le plat: les États Unis ont ses intérêts et ses priorités, l’Europe est majeure et vaccinée, il est temps qu’elle s’assume. Or, vue l’état actuel du niveau politique, elle ne peut pas s’assumer.
Les déclarations du Président français sont tellement pitoyables, qu’il n’est pas nécessaire de les reproduire, on a l’impression d’être dans un bac à sable. La Chancelière allemande digère mal le retour de baton après l’adoubement de B. Obama qui officiellement lui donnait les clés de l’UE dans sa tournée mondiale de sortie.
L’on remarquera que sur les plateaux de télévision, tous les experts rappellent au peuple américain qu’ils sont amis, frêres, que l’UE est même un projet américain, que les européens ausi étaient là lorsque les américains avaient eu besoin d’eux. Ils n’ont pas le droit de les abandonner, comme Jésus sur la Croix ils sont pleins de confusion et de ressentiments envers le Père Protecteur. L’on n’aurait pu imaginer il y a 5 ans de telles déclarations. Il s’agissait à l’époque de nous expliquer que l’UE est un projet autonome, pour l’Europe et contre la domination US. Il n’est plus temps de faire semblant, tous transpirent la peur par tous les pores de la peau. Je ne sais pas ce qui domine en voyant ce spectacle: l’écoeurement ou la pitié.
Car il nous faut bien comprendre qu’ils sont dans une impasse. Idéologique et politique. Dans tous les cas de figure. Leur démarche est emprunte de néolibéralisme, c’est-à-dire une déviance du libéralisme qui combat l’Etat afin de permettre au marché de se développer sans entrave, qu’elles soient physiques ou juridiques. Mais le néolibéralisme ne sait pas construire, ce n’est pas sa fonction: il déconstruit.
Pour ceux qui prônent plus d’UE, et donc moins d’États, voire plus d’États du tout, il faut bien transférer les fonctions étatiques au niveau de l’UE. Et cela nécessite de reconstruire un Etat européen. On ne se débarrasse pas de l’Etat, on le déplace. Et quid de la sécurité des frontières avec la Roumanie, la Grèce ou l’Italie? Et qui va perfuser les pays de l’Est pour qu’ils restent européens s’il faut s’occuper de la défense, et donc mettre sur pied une véritable armée? Quelle politique sociale dans un espace aussi différencier? Première impasse.
Un exemple de cette impasse est Macron. Ses déclarations pour plus d’Europe sont légion, sa visite en Allemagne continue dans les faits ses effets d’annonce. Mais il y a un aspect qui n’est absolument pas analysé chez lui, c’est son impact sur les institutions de la Ve République. Les Primaires de la gauche nous mènent au chevet d’un cadavre politique et le pays risque de perdre un parti historique, qui s’est suicidé lui-même en renonçant à ses origines. Dire que la Gauche est divisée revient à ne rien dire, il suffit d’imaginer que l’on ait pu sérieusement envisager Macron dans une Primaire de Gauche pour comprendre l’étendue des dégats. Mais imaginons, ce qui est loin d’être gagné car la dimension purement médiatique est très forte ici, mais imaginons que Macron soit élu Président. Comment vont fonctionner les institutions? Elles ne vont pas fonctionner, pas celles de la Ve en tout cas. Car la Ve République est fondée sur un système partisan: il faut la majorité au Parlement pour gouverner, sinon il faut former une coalition, à moins que le Président ne se retrouve en cohabitation et ne puisse gouverner. Or, Macron n’a pas de parti. Il débauche, ce qui est différent. Ici aussi ce serait la fin de la Ve République et de la logique républicaine française.
L’autre impasse concerne ceux qui reconnaissent les difficultés actuelles de l’UE, son manque totale de légitimité, ses dérives, mais pensent qu’il est possible de réformer l’institution. L’UE fonctionne parfaitement en fonction des buts qui lui furent assigner: affaiblir les Etats européens, être une plateforme de transmission des intérêts atlantistes globalistes, être une plateforme d’appui de la politique étrangère de démocratisation à marche forcée du monde. Elle remplit parfaitement ses fonctions, seulement le contexte a changé. S’il y a une réelle volonté de sortir de cette crise, qui a également une dimension nationale, elle passe par le démantèlement de l’UE pour penser une politique européenne, qui a besoin des Etats. Comme le montrent et les Etats Unis et la Grande Bretagne.
Le XXe siècle a pris fin. Les époques n’ont pas de calendrier précis, elles ne sont que l’oeuvre des hommes. Nous avons eu un peu trop peur de l’avenir, maintenant il va falloir arrêter le nombrilisme infantilisant, et penser non pas le monde de demain, mais notre monde. Après quelques crises d’hystérie et de larmes, il y a une chance de pouvoir reprendre notre avenir en main. A nous de savoir saisir cette chance.